samedi 15 janvier 2011

Jean Lecointre

Jean Lecointre « Greenwich, photomontages 1995/2010 »
Lieu Unique,quai Ferdinand-Favre.
Exposition du 11 février au 6 mars.
Entrée libre mardi>dimanche de 15h à 19h.
http://www.lelieuunique.com/actualite/index.html



Un soldat américain transformé en frites rencontre une Eve roucoulante à Woodstock, une tartine à la naïade, des lys-combattants, « Baba Big Bang » le baba au rhum s’allumant une cigarette ou encore des souris-infirmières…Bienvenue à « Greenwich » !

Quinze ans de montages signés Jean Lecointre. Quinze années à la créativité sans faille et à l’inspiration débordante. L’artiste est un magicien de l’informatique, mêlant vieilles affiches, photos vintages et images numériques dans un univers totalement délirant.

Vous découvrirez aussi le microcosme extravagant des studios « Turkish Delights ».
40 bandes-annonces farfelues sont projetées : James Bond en cigarette russe, Palmito idole des jeunes dans « cœur de vedette », les sœurs Tatin, le boudoir de ces dames gentleman parmi tant d’autres, la véritable histoire du croissant Show.

Avis aux pâtissiers ou autres fins gourmets, les personnages burlesques mi-humain mi-entremets vous dévoilent tous leurs secrets.

POINCLOU Violette


John-Franklin KOENIG

John-Franklin KOENIG
Chapelle de l'Oratoire, 10, rue Georges - Clemenceau / Nantes
Commissaire, Vincent ROUSSEAU
29 janvier 2011 - 3 avril 2011
http://www.nantes.fr/culture/actualites-culturelles/2011/koening_oratoire



" Oublions les cartels, les dates, l'ordre chronologique. Posons-nous cette question. Par où commencer ? Quel médium complète l'autre ? Lequel est l'influent, lequel est le complément ? "

A première vue, il semble y avoir une confrontation. Mais au fil de la visite, cette dernière se transforme en une sorte d'emboîtement, comme si deux parties opposées pouvaient fusionner.
Comment ne pas saisir cette frontalité entre ces domaines ? La photographie, la peinture ou encore le collage.
Cet ajout et cette extraction de papier par le collage semblent être une recherche de la matière, un questionnement sur la composition du matériau. Ce principe se reflète dans la photographie par ces gros plans de matières diverses comme le ferait un miroir.
Cette quête, cette volonté de rechercher nous pousse à déambuler, faire des allers-retours entre les deux zones, mais deux zones fondues entre elles, comme à cheval l'une sur l'autre.
L'œil est d'abord attiré par ces tâches de couleurs, floues de loin, mais est de suite stoppé par cet accrochage de photographies laissant apparaître une étude, une constatation, un compte-rendu.
Errer.
De brefs coups d'œil.
Mais des regards intenses qui nous font réfléchir.
Nous renvoyant à des choses précédentes ou suivantes, les œuvres agissent comme des balises tel un jeu de piste. Nous voilà lancés dans une course d'orientation, agréablement guidée malgré une forte apparence de labyrinthe et jonchée de surprises au deuxième, troisième, quatrième regard…
Ces va-et-vient donnent le tournis. Ils nous poussent à nous asseoir sur ce fauteuil au centre de la Chapelle, comme si l'exposition était vouée à nous transporter devant ces œuvres massives comme étant une réponse, le point de vue final, en l'occurrence ici, l'arrivée.

Vasseur Rodrigue


Jean-Claude Pondevie et Malika Pondevie

Jean-Claude Pondevie et Malika Pondevie
21 janvier - 5 mars 2011
Galerie Mélanie Rio, 34 boulevard Guist’hau, Nantes
www.rgalerie.com

J’ai rencontré le temps 

Le voile des apparences
Le désert, l’autre voix   

Nous entrons dans la galerie
Nous passons de la lumière à l’ombre, à l’obscurité
Là notre regard est comme happé par une lumière, un carré de lumière
Un paysage se dessine devant moi, opalescent
Comme à peine suggéré
Le chercher pour mieux le trouver
Et pour mieux en apprécier la composition
Désert plat seulement ponctué par quelques cailloux
Le regard se détourne
Et est de nouveau happé
Là en pleine lumière du jour
De nouveaux  paysages mais cette fois-ci noirs d’encre
Un velouté de gris sombre et de noir
L’envie de s’approcher de toucher ce voile noir
L’envie de se plonger dans ce souvenir
Je contemple un à un, ces instants
Je suis prise d’une torpeur
Je me replonge dans cet espace sombre pour emprunter l’escalier
Là, nouvelle apparition
Couleur rouge pourpre
Scène mystérieuse évoquant la peinture
Autant de scènes invitant au voyage et à la découverte

Manon Rolland


Place Vendôme - Jean-Sylvain Bieth

26 novembre 2010 – 13 janvier 2011
Musée des Beaux-arts de Nantes
www.museedesbeauxarts.nantes.fr

Il y a ces chiffres, suspendus au plafond, huit énormes caractères noirs qui vous marquent la rétine comme un tatouage au fer rouge, huit chiffres branlants, qui menacent de nous tomber dessus et de nous écraser sous le poids de leur odieuse symbolique.

La pièce est claire, presque vide, mais chargée d’une atmosphère lourde et obscure, nous  sommes presque convoqués au tribunal, mais l’avocat de la défense est là, pleinement investi dans sa mission, fermement décidé à clamer au grand jour l’innocence de son client mis à mort par une justice corrompue.
Place Vendôme, les faits sont clairs! Indiscutables.
Les Cribleuses de blé, un tableau au format colossal pour des gueux, impossible de l’ignorer, les preuves sont là, irréfutables!

L’institution a frappé fort ! L’accusateur a des ressources, et pas des moindres. C’est un coup dur pour la défense, mais le temps joue pour elle, les décennies qui nous séparent des faits ont fini par faire craquer le vernis fixateur des consciences. Le pourquoi du comment nous échappe et l’Histoire, doucement, devient anecdote. Ce qui nous reste, ce sont ces symboles, assemblés dans des images qui libèrent en moi une douce nostalgie que je ne comprends pas.

Les chiffres tombent petit à petit et dans leur chute, lente et légère, ils disparaissent dans l’air comme le dernier souffle de l’homme, le souffle de la liberté retrouvée.

Léna Laville


Air(e) de retard

Air(e) de retard
Alain Bernardini
Exposition d'Alain Bernardini, à la base d'Appui d'Entre-deux,
du 13 novembre au 18 décembre 2010
http://www.entre-deux.org/


Don d'accès.

Prenez position, le retard des uns fait le retard des autres. Soyez pour une fois un retardateur.
Retardateur et non retardataire. Actif et non passif.

Pas de fioritures inutiles, cadrage simple, lumière en aucun cas idéaliste, le ciel y est même nuageux et grisâtre.
C'est aux abords d'autoroute plus que communs et devant des devantures métallisées de hangars en activité qu'Alain Bernardini nous donne rendez-vous. Un rendez-vous plutôt atypique doit-on dire.
Imaginez-vous ouvrier, cadre supérieur, attaché commercial, plombier, électricien ou que sais-je encore. Sortant de votre domicile, point A, vous arborez fièrement votre tenue de travail pour vous y rendre sans tarder, point B. Maintenant imaginez un lieu de transition, un lieu qui vous invitera à prendre du retard sur une aire prévue à cet effet, point C. Etrange dîtes-vous? Quoi de plus normal pensez-vous. Pourquoi voudriez-vous prendre du retard ? Eh bien le photographe Alain Bernardini a travaillé sur la question. Il invite des ouvriers et salariés d'entreprises diverses de la région à prendre ce délai  et à le déguster sur un canapé.

Regarder un film quelques minutes au bord d'une route, s'adosser à une voiture en contemplant le ciel, écouter de la musique ou bien encore ne rien faire, le tout agréé par un panneau de signalisation mobile "air(e) de retard". Un panneau pouvant se mouvoir, s'incruster et se placer où bon son commanditaire lui semblera. Un espace se crée alors, un espace qui tient entre ses mains un enjeu de société. Alors qu'aujourd'hui le monde du travail nous asphyxie de règles déshumanisantes et déshumanisées, l'artiste tend à bouleverser ces codes en invitant les premiers concernés à réaliser la révolution du retard. Un retard qui n'a aucune valeur au sens juridique du terme mais empreint de saveurs.
Le temps prend alors une autre dimension, il se détourne de sa fonction première.
On prend son temps, on s'arrête, on regarde, on observe, vous savez ces choses dont vous n'avez plus le temps de faire entre le matin et…le matin. Ici que nenni. On prend le temps de respirer et on jouit des choses simples que le monde du travail tend à nous obstruer de plus en plus.


Aurélien Guitard




KISS THE PAST HELLO

KISS THE PAST HELLO
Larry Clark
Au Musée d'Art Moderne , Paris
Du 8 Octobre 2010 au 11 Janvier 2011.

Le titre de l'exposition du photographe et réalisateur Larry Clark au Musée d'Art Moderne de Paris nous en dit tout. A 67 ans, l'artiste a voulu réorganiser son passé, pour faire table rase, à travers son regard neuf, distancié, sur toute une vie.
Et c'est d'abord un hommage à sa mère qui l'a ouvert au monde de la photographie. Dès nos premiers pas, timides s'il en est, on s'amuse de la facétie et de la tendresse avec laquelle cette femme a mis en scène les enfants en bas âge et les animaux, souriant avec insouciance quand des chiens se retrouvent assis derrière les pupitres d'une classe d'école. Lentement d'autres visages, ceux d'une jeunesse anguleuse et sinistrée s'installent. Les portraits de Tulsa semblent vivants, cerclés de contrastes parfaits, les yeux s'animent de rage et chaque détail, d'une crudité vibrante, semblent avoir été pensé, tant le moindre reflet paraît traduire une émotion. Larry Clark a réussi dans sa propre jeunesse a capturé en quelque sorte ses compagnons d'arme. Un film muet en noir et blanc met en mouvement les images. Comme le regard d'un junky, la caméra tangue sans cesse vers le sol, créant un rythme. Dans un lit, un garçon se lève, nous dévoilant le corps d'une fille enceinte dont il bloquait la vue jusque là. Les aiguilles pénètrent les peaux et les bouches remuent, grimacent, se déforment mollement, sans qu'aucun son ne vienne troubler la vision. Le film s'achève avec des arrestations en série, l'auteur filmant fixement les conséquences d'une existence trouble. Car Larry Clark est un moraliste de l'extrême. Non content d'avoir crocheté la porte de la sacro-sainte chambre de l'adolescent, montrant pour la première fois ce que d'aucuns ne voulaient voir, il nous met face aux répercussions les plus sordides du Drug, Sex and Rock'n roll. Ici une fille enceinte se pique, avec le contraste fulgurant de la grâce maternelle de ses formes confrontée à la rouille d'une vilaine aiguille. Là, le cercueil, toujours trop petit, de l'enfant mort-né. Pour comprendre le choc assourdissant de ces images, il n'y a qu'une chose à faire : les voir de ses propres yeux.
On nous raconte une histoire et celle-là finit bien. La seconde moitié de l'exposition est consacrée à un passé plus récent, où à l'occasion d'un film devenu culte dans le monde du skate, Larry Clark a rempilé, pour explorer avec son œil âgé une autre adolescence : celle des skaters, mexicains d'origine, de Los Angeles. L'un deux, Jonathan Velasquez, désormais bon ami de l'artiste est mis à l'honneur. Celui qui a appris à Larry Clark a skaté, à pas moins de 50 ans, se prête à tous les jeux. Exhibant son corps sec avec pudeur au côté de la belle Tiffany Limos ou ses cheveux multiformes, il nous traîne avec son gang à la conquête du pavé. Dans cette jeunesse-là, l'insouciance et la quête de ses propres limites prennent une autre forme, toute aussi sauvage, mais plus pure et sans conteste moins délétère. Un immense collage, assemblant brochures de journaux et souvenirs de toute sorte trône ainsi au centre d'une salle, réveillant chez nous curiosité, amusement et surprise.
Cette exposition aura fait couler beaucoup d'encre pour la censure dont elle a fait l'objet. Mais une once de sensibilité permettra à chacun de la vivre par lui-même, car ce qu'elle nous décrit est une époque charnière inhérente à l'homme, et le message qu'elle délivre est proprement universel.

Lucie Boutoute
Hullabalette.blogspot.com


vendredi 14 janvier 2011

Cy Twombly

Cy TwomblyCAMINO REAL
Gagosian Gallery
4 Rue de Ponthieu (Champs Elysées), Paris


J’entre dans la vaste pièce, blanche et silencieuse, échappant à la frénésie du quartier, des avenues et de la foule. Le silence est profond, presque sacré. Pourtant un bruit attire le regard.
De hautes et larges toiles encerclent les visiteurs, bruyantes de par leur contraste avec l’atmosphère immaculée du lieu, polyptiques, presque jumeaux, unis contre la froideur des murs.
Des couleurs fortes, chaudes, jaillissent par gestes successifs répétés, inlassablement. Les fonds de verts surnaturels trompent l’œil, crient leur force aux spectateurs. Les couleurs se détachent en couches successives. La gestuelle sur l’aplat parfait. Elles avancent vers nous, se décomposant comme pour mieux être vues, un simulacre d’éclaté industriel. L’abstraction plate semble exploser.
On s’approche, on cherche à comprendre cet effet d’optique, on recule. On contemple.
Camino Real. On s’interroge. Sommes-nous en présence de comédiens? Assistons-nous à une représentation? Étonnamment, la question demeure sans réponse, et les tableaux évoquent autant l’œuvre de Tennessee Williams qu’ils gardent leur secret. On cherche des signes des personnages de la pièce de théâtre
Casanova, Esmeralda, Don Quichotte? Pas de réponse.
On ne peut qu’assister aux jeux de couleurs, la légèreté du travail, pourtant si acharné, et se perdre un temps dans le ballet des touches de couleurs successives.

Théo FERRÉ

Blue noses

Saison russe
Blue noses
Viacheslav Mizin et Alexander Shaburov
Musée des Beaux-arts de Nantes
5 novembre 20 10 - 2 janvier 2011

 La vidéo présentée par Viacheslav Mizin et Alexander Shaburov traite pour commencer de la mondialisation, et met en scène les deux artistes faisant des sketches, avec des montages, à la Méliès, en utilisant de vieux postes télé. Les gags sont lourds mais ont du fond. On est dans la dérision la plus complète, les petits films s'enchaînent sur des musiques classiques : Des scènes de sexe avec les artistes portant des masques de personnalités telles que G.W Bush, Ben Laden, Oncle Sam, Vladimir Poutine, Marylin, etc...
Des petites animations faussement naïves nous expliquent le bien et le mal, de temps en temps une femme ronde nue portant des baskets et une couronne orientale défile en planant sur un fond noir.
Les deux artistes russes nous présentent par de petites scènes comiques et enfantines les relations internationales, le commerce, le terrorisme, ils vont jusqu'à mimer les tours jumelles s’effondrant, à l'aide de petites fusées explosives qu'ils utilisent assez souvent d'ailleurs, notamment dans un sketch appelé « if I were Harry Potter » dans lequel toujours avec des trucages visibles et volontairement ridicules, un homme déguisé en Harry Potter, refait le monde, en faisant disparaître la prostitution, les drogués, les alcooliques, etc …
Une brève partie du film est consacrée à la culture russe, à la résistance, les artistes parodient les mouvements de résistance et baissent leurs pantalons.
La vidéo est un peu longue, mais néanmoins créative, et plus ou moins comique.
Elle fait assez justement une critique de la société actuelle, des relations internationales, visant particulièrement les Etats Unis et la guerre en Irak. On en retiendra malheureusement un certain aspect brouillon et confus, qui est probablement voulu mais peu intéressant esthétiquement parlant.

Nielsen LANDRIEVE


OLGA BOLDYREFF – CHAPELLE de l'ORATOIRE

Créature-nénuphar échouée. Baignant dans son écume-tissage elle se répand
mollement.
Les tentacules de maille se mêlent, les racines textiles se confondent; la
bête et son être s'entrelacent. Pieuvre de laine à reposer sur son lit de
roche. Bulbe-tricotin composite sur lequel doucement sont venues piquer
les aiguilles, sont venus s'accrocher les points, sans jamais venir
troubler son congé.
Douce paresse, douce mollesse. Lente broderie. Elle sait qu'elle a le temps.

Sous la peau sur le fil: le monstre est endormi.

Tout est silence mais dans le creux de la matière palpite la chair
vagabonde. Voici le murmure brûlant d'un monstre qui sommeille. C'est en
son sein que tout remue que tout se noue. Couvé sous une peau de tricot il
chuchote le mystère, et chacun est enclin à tendre l'oreille vers son
imperceptible langage.

Partout le fil, liant organique d'une matière flottante qui peut-être en
son cœur respire, dessinant aujourd'hui le squelette de ces muettes
chrysalides, esquissant demain les corps paresseux de nouvelles absences.
Les créatures sont enfouies. Ne demeurent que des enveloppes fantômes,
épidermes de laine pour qui ne saura soulever l'épaisseur du silence,
silence dans lequel la parole improbable sait à coup sûr se lover.

Partout ces pelotes, partout la veine de laine prête à s'en retourner.
Elle caresse les murs, caresse le sol. Sillonne l'espace et trace le
chemin versatile de celle qui se sait changeante. La palabre-laine,
fugueuse, tend à s'éclipser; la parleuse flotte indécise, roule et se
déroule, se réenroulera sûrement. Un jour. Car elle sait qu'elle a le
temps.

Maille, par maille.

Manon David


Olga Boldyreff, Les Devenirs, 2010
© Ville de Nantes – Musée des Beaux Arts

Voyage vers l’inconnu

Poussée par A je me précipitais au Lieu Unique pour acheter un ticket. Je fonçais droit vers l’inconnu, le nom de l’artiste ne m’évoquait rien. La salle de spectacle finissait enfin de se remplir lorsque déjà l’obscurité achevait de tomber.
La femme seule est entrée sur scène, Elle a placé son corps au milieu de la flaque de lumière dessinée sur le sol par une poursuite. Elle est restée là, dans le silence. Silence amplifié sans doute par l’attente d’une foule, les yeux impitoyablement fixé sur sa solitude.
Soudain, étrange et née du plus profond de son être, sa voix envahit l’espace, dessinant sur les murs des paysages. Des encres coulent d’un plafond invisible, se rependant sur la foule des spectateurs masqués par le noir environnant. Je pense souvent à cette image qui fut pour moi l’occasion d’un voyage unique.

Chuchotements

Gémissements

Souffles


L’imagination est convoquée, par cette voix, qui transporte, fait rêver, émerveille. Habitée par l’écho de différentes cultures, Japonaise, Africaine. Le lieu lui-même semble se mouvoir, doué d’une volonté propre, transfiguré par les mouvements de cette voix.


Plus tard Elle sera rejointe par d’autres voix, mais là sienne reste unique.

Quant enfin délivrée de ces songes je me réveille, il ne reste que cette impression vague :

Cette voix est un voyage.

Et son nom c’est Meredith Monk.

Aline Da Rocha  

Untitled

André Kertesz
Jeu de Paume
Paris

Votre attention svp, nous commençons notre voyage en 1914, notre, VOTRE, guide sera le photographe André Kertesz. A travers ces yeux ou plutôt son appareil photo vous serez bercés dans un premier temps entre photos intimes et reportages journalistiques. Ainsi vous serez plongés dans la Hongrie de la fin des années 10-20 dans un ton noir et blanc voir sépia. Attention aux yeux, l'image peut être brute, violente choquante ... mais belle à la fois ! Une première partie certes dans les vestiges de l'Europe de l'Est mais aussi dans les bribes de ces propres souvenirs à travers différents portraits de ses parents ou frères ... les mouchoirs ne sont pas inclus.

Photos argentiques figées par le noir et blanc, "OUI monsieur !", mais pourtant elles sembleraient presque agressées, giflées par des couleurs, tellement ces moments captés sur papier nous parlent.

Attentions Mesdames et Messieurs veuillez attachez vos ceintures nous entrons dans une aire de turbulence

André Kertesz nous, vous propose une seconde étape à son voyage ... cette fois-ci presque plus "fantaisiste".

Bienvenue dans les "distorsions" ... un principe photographique se basant notamment sur des miroirs créant des formes étranges ... à votre droite vous verrez une femme au dos long et à petite tête à votre gauche une autre femme à l'épaule presque aspirée ... par qui ? par quoi ? L'imaginaire certainement !

Une question ? Oui monsieur ? Non vous ne rêvez pas ! Mais lui nous fait rêver !

La comparaison à un Lewis Carroll ou George Méliès de la photographie est peut-être excessive mais m'est personnelle !

En vous souhaitant un agréable voyage

Enlil Albanna


TRANS-FORME

TRANS-FORME
Moebius
Fondation Cartier (Paris)
12 octobre 2010 - 13 mars 2011

Il y a quelque chose de fou ici, quelque chose de follement contrôlé. Peut être est-ce l’idée d’un univers entièrement matérialisé par l’expérience déraisonnée du rêve ?

En proie à toutes les angoisses de l’abstraction ; il erre dans ses mondes artificiels de papier et d’équations, sujet aux métamorphoses. Et alors que le vide infini s’ouvre sur la transfiguration spirituelle de L’Incal, la simplicité du dessin apparaît. Tout y est réuni, en transe, pour formaliser la réalité rêvée du monde. Formaliser l’expérience du moi extériorisé. Nos quotients oniriques, décuplés par l’ultra-fluidité des cristaux se peuplent de particules virtuelles. C’est imminent. La face bis du Désert B entre en fluctuation. Le ciel se terrifie. Le temps se réifie.
Le chant du sorcier souffle un amour éventrant. Les Sept directions se matérialisent en torrents de couleurs et de traits foisonnant sur le blanc du papier. Les substances à rêver ne sont plus que des illusions perdues sur une terre aléatoire évaporée. Le désert en musée se travestit, tandis que ses formes s’exposent à notre inconscient. On se défausse de penser, se laissant guider par le rythme effréné des pages griffonnées. Il est des figures que l’on peut compter sur les doigts de celles qui nous sont contées. Il est une musique schizophrénique qui raisonne sur l’horizon. Il est une science démesurée dans l’épaisseur d’un cheveu d’encre glissé sur une page de BD.

Ely Bessis

jeudi 13 janvier 2011

Voyages et autres investigations

Olga Boldyreff Chapelle de l’Oratoire Nantes

Je me présente devant la porte discrète sensée mener à l’exposition. Pas un bruit, peu d’indications. Me serais-je trompé ? Porte ouverte : c’est bien là, les œuvres exposées en témoignent.
Mes premiers regards vont à deux œuvres placées au milieu de la chapelle : deux « pelotes »  de fils entrelacés, aux couleurs variées qui rompent avec la sobriété de la chapelle. J’ai bien envie d’aller observer cela de plus près mais en garçon sage et discipliné, je commence l’exposition à son début.

Certaines œuvres m’arrêtent, notamment ce fameux, Faux monochrome (Olga Boldyreff). Laissez-moi vous le décrire :  Un monochrome  à la manière de Klein dans une teinte de gris. Seulement celui-ci n’est pas peint mais rempli de bandes de laine de largeurs irrégulières. Je vous laisse imaginer le résultat. Outre l’aspect esthétique que j’affectionne, j’aime la façon dont l’artiste arrive à nous surprendre dans la forme à partir d’un thème déjà amplement traité.

Je continue le voyage auquel nous invite Olga. Celle-ci me devient de plus en plus familière. En effet, l’exposition est faîte de telle sorte que l’artiste nous présente en même temps que ses œuvres, les œuvres et artistes (Kasimir Malévitch, André Cadere, Alighiero e Boetti pour n’en citer que trois) qui l’ont influencée, inspirée tant dans les idées que sur la forme. J’apprécie cette mise en regard des œuvres et des influences de l’œuvre. Cette présentation enrichit les œuvres et notre compréhension de celles-ci.

Je poursuis. J’arrive enfin à ces deux « pelotes » qui m’ont marqué dès mon entrée. Les deux pièces s’intitulent Les devenirs. De plus près, ces deux pièces m’intriguent. Que représentent-elles ? Où vont ces fils sans commencement ni fin ? Je me perds à essayer de comprendre. Devrais-je me satisfaire de l’aspect esthétique, qui me plaît tant ? Je médite encore. Voilà l’interprétation que j’en fais finalement : l’ œuvre montre la complexité de la Vie. Non pas la vie d’un individu particulier mais la Vie en général qui ne commence et ne finit jamais vraiment.  Je suis satisfait de cette interprétation.

Le voyage touche à sa fin. Un dernier coup d’œil avant de rentrer. J’ouvre à nouveau la porte, dans l’autre sens cette fois. La fraîcheur de l’extérieur me glace. On était mieux à l’intérieur…

Sébastien Gal.
L1 Audencia

Regards croisés : Nantes/Bamako

Première impression : « Quoi ?! Une exposition de photographie ? C’est impossible…la qualité des photos est à mourir ! ». Mon cœur est de glace devant cette première série Les Maliens de Paris. Les photographies pixellisées me sont jetées à la figure, je ne vois que ça.
Je persévère, je marche, d’une photographie à une autre, je m’arrête et regarde : Certains matins.  
Certains matins pas comme les autres : un bel adolescent torse nu se tient debout, il nous tourne le dos ; la lumière du soleil traversant le tissu nonchalamment pendu à la fenêtre crée cette atmosphère chaude, paisible, d’un beau matin. Je continue mon excursion. Certains matins j’offre des fleurs à ma copine, voilà un titre léger, si ce n’est enfantin pour une photographie sérieuse ! Peu importe, continuons, même dans l’incompréhension : une femme assise à une table, dans la pénombre. Sa posture suffit. On comprend son bonheur, on imagine un sourire lorsqu’elle tend son bras et récupère le bouquet de fleurs.

Je quitte cette pièce où les photographies me semblent étrangement de basse qualité, bien que je me sente, au fur et à mesure, de plus en plus touchée. Nouvelle série : Chambres maliennes.
C’est toute une histoire qui s’offre à nos yeux ! Toujours cette qualité médiocre de photos, mais j’oublie. Je suis prise au jeu, voilà que je rentre, sans même le réaliser, dans l’intimité du photographe qui nous livre avec candeur, spontanéité, simplicité ses histoires d’adolescent. J’imite la façon dont on emballe les morts et ma famille me gronde : un adolescent drapé dans un tissu troué se tient devant nous, je souris. Certains matins je n’ai pas le courage de commencer la journée : la tête dans les mains, assis sur son lit…que c’est dur ! Un petit bout pour les moustiques : une main endormie dépasse d’une moustiquaire et l’on devine la suite. Ce n’est pas mon jumeau, c’est mon meilleur ami : deux adolescents, allongés, les yeux dans les yeux, même position, même affection l’un envers l’autre, tout se voit, tout se ressent, belle complicité. De la bêtise à la fatigue, de la fatigue à l’humour, de l’humour à l’amitié…c’est une vision simple, légère, attendrissante, vraiment touchante, que nous livre ici Mohamed Camara, 19 ans à cette époque. Ce jeune malien, nous fait oublier ces clichés où la pauvreté de certains pays d’Afrique, tel le Mali dont il est originaire, masque la gaieté d’une vie quotidienne épurée. Nous ne sommes pas au Mali, nous sommes dans l’univers d’un jeune malien.

            Le petit oiseau est devenu grand. Nouvelle pièce, nouvelle série, série 2010 : Regards croisés Nantes / Bamako. Surprise : finies les photographies mal tirées, place à la qualité, finis les titres enfantins, place à davantage de sérieux. Les photographies sont maintenant en couple : le mari est nantais, la femme malienne. Les photographies vont deux par deux, elles se font écho.
Une partie de foot à Nantes, peut-elle être vue de la même façon au Mali ? Et qu’en est-il alors de ce Malien adossé à un mur jaunâtre, la tête penchée, le regard fixe, le torse nu, un tissu bleu autour du cou : ne serait-il pas en train de poser, à sa façon ? Je déplace mon regard légèrement vers la gauche, la photographie à côté me fait rire : un Nantais timide à la chemise blanche, se tient devant une splendide affiche Dior ! Pointe d’autodérision ? Je fais peut-être une erreur, simple interprétation. Passons au couple suivant. J’ai hâte. Mais que vois-je ? La Place Royale, magnifique…royale même ! Une ombre, une simple ombre, une ombre sobre, très sobre, une ombre sans expression vient agrémenter la photo. Cette ombre, je la retrouve à Bamako, plus vivante, plus prenante : elle se projette sur cet énorme rocher qui surplombe la rivière. Cette ombre a cette fois, les bras levés, elle crie, elle est puissante. Ce couple me plaît. A deux pas de moi, un autre couple, allons voir. Un feu d’artifice aux multiples couleurs est figé là, devant moi. C’est le nouvel an à Nantes. Et au Mali ? Trois…deux…un…et non, pas de feu d’artifice. Un simple « Joyeuses Fêtes » inscrit en rouge, bleu, vert, sur une chèvre blanche. Tiens…mais que vois-je au loin ? Un couple marrant, légèrement ironique cette fois ! A droite, je peux parfaitement lire « Quick WiFi gratuit. Tout droit à 1 mn », c’est propre, c’est net. A gauche ou au Mali - comme on veut - je devine sur une pancarte en bois « WiFi station artisanale. 25 FCF A / heure ». Contrairement aux apparences, les couples de photographies ne sont pas là pour s’entretuer, ils se complètent, ils se renvoient la balle, en toute simplicité. Pas d’appel à la critique ici, pas de dénonciation sarcastique, rien de géopolitique, ni de manifestation contre la fracture numérique ! Il n’y a pas de ça ici, seule est perceptible la volonté d’un jeune Malien de nous montrer le double visage d’une vie, tantôt dirigée vers le Nord, tantôt vers le Sud, avec une douceur, une candeur troublante au début, touchante à la fin.

Allez…venez…et entrez dans l’Atelier au 1 rue de Chateaubriand pour voir l’exposition de Mohamed CAMARA « Regards croisés : Nantes/Bamako » et laissez vous lentement séduire par l’évolution d’un artiste qui, à 19 ans, rêvait de devenir footballeur professionnel et qui par hasard, s’est retrouvé un appareil photo entre les mains pour ne plus le quitter…

Exposition de Mohamed Camara intitulée : «  Regards croisés : Nantes/Bamako »
L’Atelier au 1 rue de Chateaubriand 44000 Nantes.
Entrée Libre du 10/11 au 5/12/2010.
Du Mardi au samedi de 13h à 19h, le dimanche de 10h à 15h

Lise Rémon
Audencia L1

Michel JOURNIAC

24 heures de la vie d’une femme ordinaire
Fantasmes /Réalités
1974

Œuvre exposée au Centre Pompidou de Paris, dans l’exposition Elles@Centre Pompidou
Entrée gratuite pour les moins de 26 ans
27 mai 2009 - 21 février 2011
11h00 - 21h00
 
Tic Tac
L’horloge tourne, les heures défilent.
La ménagère a 24heures pour montrer qu’elle est la femme au foyer parfaite
Arrêt sur images. Panorama  noir et blanc

Etrange banalité ?
ELLE,
Et son habit de ménagère
Souriante, aimante, intentionnée
Prise dans une machine infernale
Celle des tâches quotidiennes
« Nettoyer, balayer, astiquer »
Oubliée, enfermée dans ce tourbillon de tâches
A la fois triste et drôle 
Cette « desperate housewife »

Etrange malaise ?
LUI,
Les traits durs, effacés
Ignorant et désintéressé
Propriétaire des clefs de la cage de verre
  s’affaire
Sa chère et tendre
Sois belle, serviable
Aux petits soins de ton mari
Mais surtout tais toi

Tic Tac. Arrêt sur image. Atmosphère dérangeante

Ce corps,
A la fois matériau et moyen de communication
Un troisième sexe
Mis en scène et instrumentalisé
Repoussant, désirant, … inquiétant
Nous tirant à la fois les larmes et les rires
Ce corps travesti dérangeant. Etrange
Le troisième sexe
Ni masculin, ni féminin


Les 24 heures de la vie d’une femme ordinaire sont là représentées par douze photographies en noir et blanc accrochées  au mur de l’exposition fait par et pour les femmes artistes. Sauf que ces photographies se situent dans une section originale nommée « Transformers », dont les œuvres rejettent les catégories sexuelles traditionnelles.

Tic Tac.
Face à ce mur blanc l’horloge se met en route. Telle une marionnette la ménagère rentre parfaitement dans son rôle. Elle enchaîne assidûment les tâches. Toujours souriante, aimante.
Pathétique. 
Cependant une question persiste … Est-ce la réalité ou un fantasme ?


Boudot Mélina
L1 Audencia
 
 

Kim En Joong

Kim En Joong
Passeur de lumière
Du 26/10/10 au 05/03/11
tarif réduit 1€, gratuité moins de 18 ans et demandeur d’emploi
Passage Sainte Croix, 9 rue de la Bâclerie, 44 000 NANTES
http://www.pedagogie.ac-nantes.fr/

Le Passage Sainte-Croix expose depuis peu certaines œuvres de l’artiste sud-coréen Kim En Jong. L’architecture du lieu se prête particulièrement bien à l’œuvre de cet artiste qui, comme il le dit lui-même, travaille la matière pour « aller des ténèbres à la lumière ». En effet le Passage, inondé de lumière du fait de son toit de verre, recèle cependant quelques zones d’ombre soulignées par les vieilles poutres qui agrémentent son architecture. Le spectateur évolue alors dans un environnement, entre ténèbres et lumière, qui favorise sa sensibilité et le prédispose à appréhender l’œuvre de ce peintre abstrait.

                Influencé très jeune par la culture artistique occidentale, son travail le distingue des artistes asiatiques traditionnels. Il est possible de voir dans cette exposition divers types d’œuvre : sur toile, sur papier, et même sur verre. Cependant, quelque soit le support utilisé, chacune de ces œuvres reflète le même cheminement de pensée. L’artiste ne cherche pas à représenter, il ne donne d’ailleurs pas de titre à ces œuvres, afin de ne pas diriger le spectateur vers une interprétation plutôt qu’une autre. A ce dernier de regarder la peinture « comme un nuage », pour reprendre les mots de l’artiste. 
                En effet, il ne s’agit pas face à ces œuvres d’y rechercher quelque chose. Le spectateur n’a qu’à se laisser guider par ses sensations. Appuyé par l’agencement du Passage et ses jeux de lumière, toute l’exposition prend une dimension particulière.

                L’amateur d’art, confirmé ou non, sera charmé par le travail de l’artiste et sa mise en scène dans le Passage Sainte Croix. Quant au spectateur qui sera entré dans le Passage par hasard pour échapper au froid glacial ou rompre la monotonie de sa journée, il aura bien choisi son exposition. On ne reste pas insensible à la lumière qui se dégage de l’œuvre de Kim En Joong, et l’on en garde un souvenir longtemps après avoir quitté le Passage.

Pourprix Madeline
L1Audencia



Edwin Apps

Edwin Apps
« les sans voix » et « il fait jour »
Galerie d’art contemporain Alain Rouzé, Nantes

L’entrée dans l’univers des sans voix d’Edwin Apps m’arrache un sourire tant ces personnages aux couleurs vives et visages lisses m’étonnent, la marée des visages identiques, bouches bée, me submerge, m’imposant le silence voire l’adoption d’une expression similaire. Ces visages privés de parole dénoncent l’impuissance du peuple d’aujourd’hui à s’exprimer, des hommes aphones, incapables de faire entendre leurs voix et surtout leurs critiques, amenés alors à tolérer une politique révoltante, celle de Bush, qu’Edwin Apps critique ouvertement.
Edwin Apps a fait l’expérience de la vie retirée du monde actuel, de sa globalité, en décidant de renoncer aux moyens de communication qui nous sont aujourd’hui indispensables. Exilé pendant un demi-siècle, il ressort de l’ombre et découvre un monde qu’il ne comprend pas, un monde absurde. Il exprime alors l’agressivité de la lumière rentrant dans une pièce montrant que le jour est levé, signalant le départ de la journée, des activités familières, peut-être trop… dès lors le monde extérieur est l’effrayant reflet de l’hostilité primaire de la nature et l’envie de rentrer, de s’enfermer pour n’avoir que pour seule compagnie les divagations de mes pensées me prend, irrésistible et troublante révélation de l’angoisse refoulée de sortir au grand jour, d’affronter la vie. Je me sentais alors terriblement proche de l’homme qui devant moi redevenait l’enfant à la fois craintif et curieux mais qui, pour grandir, devait quitter son cocon et la chaleureuse douceur qui y régnait. Le message politique de l’artiste, indispensable à mes yeux afin d’apprécier ses œuvres s’estompe dès lors que chacun trouve la résonnance personnelle qui lui permet de ressentir l’œuvre…
C’est la vérité troublante, crue que nous offre l’étonnant Edwin Apps, incisif, plein d’humour et avec cette part d’enfance rafraichissante dans un monde trop grave et trop sérieux, où le rêve et les convictions disparaissent trop souvent dès l’entrée dans la « cour des grands »…


Lucile Sanquer
L1 Audencia


Jean-Michel Basquiat

Jean-Michel Basquiat,
Musée d’art moderne, Paris du 15/10/2010 au 31/01/2011

Un appel, un cri. L’envie viscérale de connaître, de comprendre la race humaine et soi avant tout. Et cette réponse qui tombe comme la lame d’une guillotine : on ne perce pas le secret de la conscience humaine. Les cours de Gray expliquent et mettent le corps à nu. Or c’est à travers le regard naïf d’un enfant perdu dans un monde décomposé que la vérité transparaît. Sa vérité. Mais aussi ses rêves, ses passions colorées et la parole poétique de cet être destiné à une vie fulgurante, de ce jeune homme qui aspirait à exister tout simplement. Si l’on est déconcerté à l’entrée, on en ressort grandi, gonflé d’un élan vital qu’a réussi à nous insuffler le prince de New York qui apposera sa couronne dans son œuvre toute au long de sa vie. 
Organisée chronologiquement, on suit le parcours du peintre depuis sa première exposition à la galerie Annina Nosei à New York en 1981 jusqu’à celle qui fut réalisée à la galerie Larry Gagosian de Los Angeles en 1986. L’évolution du style est sensible ; on note en effet un glissement d’une peinture essentiellement composée de figures divines et humaines qui exhibent leur anatomie et de jets de couleurs vives à une peinture relativement plus sobre et plus bouleversante dans la mesure où les mots et les chiffres instaurent un dialogue avec le dessin. Mais la transition reste floue tandis que les influences extérieures viennent enrichir la vision déjà large et originale de cet artiste marginal et charismatique.  Son regard curieux se pose sur toute sorte d’objets et d’œuvres qu’il invite dans ses tableaux et qui deviennent dès lors les sujets de notre curiosité. Une exposition radieuse qui force ceux qui se laissent happer par ses compositions à retrouver leurs yeux d’enfants et leurs premières angoisses face aux souffrances humaines et à l’inanité de l’existence.

Laure Deroche
L1 Audencia

Air(e) de retard Exposition d’Alain Bernardini

L’artiste-photographe, vitriote, ancien résident du CENTQUATRE, tente de proposer depuis cinq ans une autre représentation du monde du travail. Cette fois-ci, il est exposé à la base d’Appui d’Entre Deux à Nantes, qui assure la promotion et la diffusion  de l’art public contemporain.

Devant la base d’Appui de l’Entre Deux, on peut voir un petit panneau routier avec comme indication « Air(e)  de retard », puis on entre par une porte vitrée, on suit un petit couloir, avant d’atterrir sur une estrade en bois. Ça a l’air chaleureux comme endroit. La preuve, un chat dort sur l’estrade. Onze photos nous font face, certaines ont comme support des panneaux métalliques comme ceux placés au bord des routes.
Camionnette. Air(e) de retard. Deux femmes. Attendre. Homme. Cravate. Voiture. Construction.
Premier sentiment : intriguée.
Aucun cartel. Pas de titre. Pas d’indice.
J’avais décidé de ne pas me renseigner sur l’artiste et sur ses travaux précédents avant d’aller voir l’exposition.
Questionnement. Déambulation. Etonnement. Tâtonnement. Questionnement. Flânerie.
J’élabore des interprétations farfelues pour chacune des photos.
Je me tourne vers des bulletins de retard, soussignés Alain Bernardini, adressés à des salariés. Pour voir ce que ça fait. Sans raison. Pour visionner des films. Pour discuter.
Je souris. C’est drôle ! Je retourne vers les photos. Je marche, je m’approche, je m’arrête, puis je crois comprendre.
Air(e) de retard. Salariés. Travail. Route. Voiture. Pause. Se garer. Temps. Hypermobilité. Résistance. Pression. Ponctualité. Paysage. Mer. Sable.
J’adhère.
Sur le point de m’en aller, dernière photo non placée sur le même mur me fait face. J’ai failli partir sans la voir, illumination ! Enfin…je crois.

Où voir cette exposition ?
A la base d’Appui d’Entre Deux
5 avenue de l’Hôtel Dieu à Nantes
Quand ?
Les mardis, jeudis, vendredis, samedis de 14h30 à 19h.
Jusqu’au 18 décembre 2010.
Entrée Libre
http://www.entre-deux.org/

La route de la soie, Le tri postal, Lille

De retour dans ma ville natale ce weekend de décembre, comment ne pas me sentir inexorablement poussée par son dynamisme culturel? Me frayant un chemin à travers la neige, je décidais de faire un tour dans ma galerie d'art contemporain favorite : le Tri Postal. Depuis le 20 octobre et jusqu'au 16 janvier s'y tient une exposition... exceptionnelle : «La route de la soie» dans le cadre de la manifestation culturelle Lille 3000. Celle-ci accueille une trentaine d'artistes venus des pays composant cette route : Inde, Iran, Pakistan, Chine... Les œuvres (soixante en tout) sont issues de la célèbre collection de la Saatchi Gallery, une des plus grandes collections d'art contemporain d'Europe située à Londres.

En entrant, une première impression, celle de voir se dessiner sous mes yeux une nouvelle route de la soie, celle d'aujourd'hui, une route du commerce international, de ses grands nœuds et de ses conséquences. Ici, une vache, animal sacré en Inde, se retrouve coincée dans un tuyau de canalisation (sculpture de Huma Mulji intitulée her Suburban Dream). Elle nous emmène dans son pays, on y voit la métaphore de tous ces paysans indiens qui eux aussi à leur arrivée dans les grandes villes mondiales naissantes de l'Inde se sont retrouvés coincés dans des bidonvilles sans issue et qui s’étendent à l'infini, démunis et sans emplois.
Là, des corps d'ouvriers chinois suspendus au plafond, progéniture littéralement «moulée» du gouvernement chinois (installation du chinois Zhang Dali, Chinese offspring).





Ces œuvres nous touchent parce qu'elles nous parlent, parce qu'elles dénoncent, et toute l'exposition est une invitation à la découverte de chacun de ces pays moteurs du monde et de leurs problématiques et injustices. Bref, un regard passionné et passionnant d'artistes sur leurs pays, étapes légendaires d'une route commerciale qui décidément n'a pas finit de faire parler d'elle.

Elise Wiart.
Audencia L1

Regards croisés : Nantes - Bamako

L’Atelier (1 rue de Châteaubriand, Nantes)
Du mercredi 10 novembre au dimanche 5 décembre 2010
Du mardi au samedi de 13h à 19h et le dimanche de 10h à 15h
Entrée libre


J’ai d’abord été surprise et déçue en parcourant les premières salles de cette exposition. Les photographies étaient intéressantes mais la qualité de tirage était mauvaise. En effet, dans ces salles (photographies de 2002 à 2006), les tirages étaient inappropriés et les pixels étaient très visibles. De plus j’ai trouvé les photographies assez inégales. Certaines paraissaient vraiment recherchées : des jeux de lumière, d’ombre et de tissus ; d’autres au contraire semblaient très amateurs. Ces photographies représentaient la vie de tous les jours d’un jeune malien : sa maison, ses proches, ses passions (le football notamment), etc. Elles étaient prises d’un point de vue assez intime. Nous entrons dans la vie du photographe et de ses proches mais gardons en même temps une certaine distance respectueuse. Par exemple, des mains sur un tissu coloré, une femme dans l’embrasure d’une porte, entre l’obscurité de l’intérieur et la lumière aveuglante de l’extérieur, deux amis dormant l’un en face de l’autre, un homme priant, etc.
En arrivant dans la dernière pièce, qui correspondait aux photographies les plus récentes de Mohamed Camara, j’ai été frappée par l’évolution de sa photographie. Tout d’abord, la qualité des photographies était très bonne ; de plus, on sentait qu’il ne s’agissait plus d’un jeune homme utilisant un appareil photo pour la première fois. En 2002, Mohamed Camara s’était vu prêter un appareil photo pour quelques jours alors qu’il était adolescent à Bamako. Il ne connaissait alors rien à la photographie mais a été tenté par le défi qui lui était lancé. Dans cette salle étaient exposés douze diptyques sur le thème regards croisés entre Nantes et Bamako.
Sans ces explications, il me semble difficile de comprendre cette exposition et j’aurais, je pense, garder un souvenir plutôt négatif de cette exposition. La démarche me paraît en effet quasiment plus intéressante que certaines des photographies. En connaissant le contexte, il apparaît clairement que Mohamed Camara a (et avait même sans connaissance de la photographie) ce « quelque chose » : un point de vue à lui.

Clémentine Pasquet
L1 Audencia

Depuis 1950, le déroulement de la peinture, JUDIT REIGL

L'extranéité du monde, le vide, le corps comme réponse.

« Tout mon corps participe au travail, 'à la mesure des bras grands ouverts'. C'est avec des gestes que j'écris dans l'espace donné, des pulsations, des pulsions. » nous dit Judit Reigl.

Chez Judit Reigl, ce qui happe peut-être le plus, c'est cette écriture corporelle, viscérale qui transcende son œuvre. Toujours entre surgissement et ensevelissement, apparition et disparition, construction et éclatement, sa peinture devient matière, son écriture se fait physique.
Juste une envie, une de ces « pulsions de corps » qui vous prend parfois : sauter,  bondir, crier...
Ce fourmillement insupportable qui ne la quitte pas.
Hurler à la face du monde « je suis une bacchante ! ».
Ça lui remonte dans l'œsophage et la prend à la gorge. Voilà que ça la reprend, des jambes qui bougent seules, des borborygmes qu'elle déverse à chaque refrain d'une chanson qu'elle sait à peine  balbutier.          
Elle voudrait s'extirper de cet univers étriqué où le corps limite l'esprit. Ce corps-entrave deviendrait alors son piège à mot, son attrape-rêve pour inventer un nouveau langage, plus total, plus absolu.

C'est ainsi que Judit Reigl nous parle dans son œuvre - grâce à cette écriture si personnelle – tantôt avec une énergie presque explosive, tantôt avec un peu de cette étrange douceur que l'on retrouve dans des œuvres plus apaisées.

Judit Reigl nous propose une véritable chute libre, suivie d'un flottement dans un espace éthéré d'où nous parviennent des bribes de cette écriture parallèle, toute gestuelle, dont elle est l'auteur.

Claire Mizzon.
L1 Audencia