« Je n’aimais pas ce qu’on
nomme les plaisirs de la chair, en effet parce qu’ils sont fades… »
Georges BATAILLE publie son œuvre,
classée dans ses débuts comme pornographique, sous un pseudonyme
Lord AUCH. Ce ne sera qu’après sa mort que son livre sera publié
sous son vrai nom en 1967 sans que BATAILLE ne reconnaisse
officiellement avoir rédigé cette courte fiction.
Entre sexualité
anticonventionnelle, perversité et fétichisme, BATAILLE force le
lecteur à se confronter à deux adolescents dont la vie érotique
dépasse et transgresse tout entendement.
Marqué par
une enfance difficile, BATAILLE assimile des éléments de sa vie
quotidienne en les retranscrivant à l’écrit par le biais de ce
couple d’adolescents à la découverte d’une sexualité hors
normes. La syphilis et les troubles urinaires de son père, narrés
dans la préface de son livre nous permettront de tisser un lien avec
l’obsession des deux protagonistes pour le jeu avec le « sale ».
Le souvenir de l’odeur de l’urine de son père sera assimilé à
de la scatophilie. Ces personnages évolueront avec ce désir
puissant né d’une souffrance morale. Les actes devenant alors de
plus en plus violents, destructeurs, et blasphématoires.
Certains objets reviennent par
ailleurs un grand nombre de fois dans l’ouvrage. Une armoire
normande dans laquelle on se branle, un revolver que l’on tient
pendant l’acte ou bien un prie-Dieu. Des lieux doux tel un bois au
clair de lune, violents comme une arène de corrida ou encore
religieux. Les lieux et éléments contradictoires entraînent le
lecteur dans un univers confus et étrange.
L’œil tient un rôle majeur, vu
comme un instrument érotique à part entière, l’œil qui observe
le désir permettant l’érection. L’œil qui devient un œuf rond
et doux qui pénètre dans la « fourrure » (terme utilisé
par BATAILLE pour évoquer le sexe féminin) du protagoniste
(Simone). L’œil sein, fesse, qui stimule le désir sexuel du
narrateur. L’œil testicule de taureau qui peut s’apparenter à
l’Euterpe (divinité ayant une multitude de seins, vus également
comme des testicules de taureau). L’œil doux luisant qui devient
organe d’excitation arraché à un curé par Simone pour satisfaire
ses désirs.
Pour BATAILLE la sexualité,
l’érotisme, la violence de la jouissance extrême sont oubliées.
Cette ascendance vers le délire et les pratiques sadomasochistes des
personnages les rendent humains. J’entends par humain fait de
chairs (palpable et déchirable) et animal à la fois, poussant leurs
désirs les plus puissants pour qu’ils deviennent des actes d’une
extrême violence érotique. La chair n’est plus fade parce qu’ils
l’ont consommée.
Les liens transversaux entre
l’enfance de BATAILLE, le sexe dans notre société, le cauchemar
et la brutalité font de cet ouvrage une œuvre complexe, dure à
ingérer et forte d’un point de vue émotionnel nous faisant vaquer
entre gêne et honte.
GARRET Lila
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