« Pour vivre
heureux, vivons cachés. »
À
l'occasion de la 22ème édition de la Quinzaine
Photographique Nantaise (QPN), qui se tenait du 14 septembre au 14
octobre 2018, le Temple du Goût exposait une série de photographies
d'Amélie Landry intitulée Les chemins égarés, deux séries
de la collection de photographies amateurs de Sébastien Lifshitz :
Couples travestis et Les Invisibles, et un film
documentaire du même titre. Le sujet du festival de photographies
était Invisible - Opus 2 : Disparition. L'ensemble
exposé au Temple du Goût évoque ce sujet sous l'angle de
l'homosexualité et la volonté de se dissimuler du regard des
autres, hier comme aujourd'hui, mais en vivant pour autant
ouvertement leur sexualité. Les chemins égarés propose une
série de photographies parlant du cruising, une pratique sexuelle
qui consiste à trouver un partenaire par hasard dans des lieux
reculés et adaptés par ses usagers, afin d'avoir un rapport sexuel
sur place. Cette pratique implique les notions d’anonymat,
d'interdit, de lieux faits à la fois pour se retrouver et se
dissimuler. Amélie Landry capture avec une grande sensibilité ces
lieux et ces personnes afin de les dévoiler partiellement. Un
attachement à la lumière, à l’obscurité et à la couleur est
présent et permet de mettre en image une pratique cachée. La
volonté de faire voir ce qui ne souhaite pas se montrer est en soi
une pratique qui pourrait s'apparenter à un certain voyeurisme,
pourtant le regard photographique d'Amélie Landry est un regard
poétique et sans jugement de valeur, et permet de mettre avant tout
une autre vision de cette sexualité souvent jugée. Plusieurs
témoignages sont également présentés et donnent ainsi directement
la parole à ces personnes et à leurs histoires. Les collections de
Sébastien Lifshitz sont des photographies amateurs d'homosexuels et
de travestis tout au long du XXème siècle. Ces documents
retrouvés sont la preuve de l'existence de ces personnes et de ces
identités au cours du siècle dernier. Elles permettent de prouver
ces existences passées, loin de l'idée que l'homosexualité ne se
vivait pas à cette époque mais plutôt de montrer un quotidien
heureux. Exposer ces photographies aujourd'hui permet de modifier la
narration prédéterminée des histoires des homosexuels, et donc de
changer la narration des histoires actuelles. Ces personnes
prouvaient d'une certaine façon leurs identités à travers ces
photographies cachées et risquées. Le film documentaire était un
ensemble de témoignages de personnes âgées qui avaient décidé de
vivre leur sexualité sans se soucier des à priori de l'époque.
L'ensemble de l'exposition fonctionnait sur ce principe d'identités
non acceptées socialement mais vécues malgré tout. La photographie
est alors un médium de mise en lumière de ce qui se cache dans
l'ombre pour exister.
MOREAU
Antoine
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