jeudi 25 octobre 2012

Modern Ghosts au lieu unique


Visite de l'exposition Modern Ghosts au lieu unique, Nantes.


Elle représente l’œuvre et l'univers d'un collectif de trois artistes belges : Jérôme Meynen, François Dieltiens et Antoine Detaille. Trois personnalités et styles différents qui s'animent en un seul imaginaire désenchanté.


 A peine rentré dans la pièce, je suis déjà happé par le premier dessin encadré grand sur le mur. Premier coup d’œil timide devant autant de fins détails, de déplacements tortueux en tous sens et insensés. Une attraction s'anime autour de cette danse figée mêlant en situation de tout genre des personnages propres à leurs univers, mais salis dans l'action qui en ressort pourtant bien poétique. J'ai tout de suite été captivé et digérai chaque action tourmentée en un unique équilibre mystique.


Le temps de faire le tour et il y a déjà une affection et une fascination pour ce monde si bordelliquement bien foutu. Les autres œuvres sont autant de puits d'imagination, un parc fantastique vivant sous le jeu perpétuel et magique d'une peuplade inconnue, qui s’entre déchire et s’entrecroise en une harmonie ni niaise ni morne. Ponctuation de couleurs automnales et de feuilles chutant parmi des animaux qui chuchotent en forêt, redondance du bois et de l'arbre, pouvant se construire en maisonnette abandonnée emportée par une tempête animale. Des têtes de morts se subliment en un si riche espace en pause. 

Ces êtres hybrides d'aspect joyeux et sympathique révèle en fait une vision caustique de la nature humaine et de la société. J'adore.


Un tour de salle de seulement quatre murs, et pourtant une grande immersion dans cette autre réalité. Plusieurs sculptures occupent l'espace intérieur afin d'unir le tout grâce à une cible, un défi d'équilibre et un portail sur petit soulier.


Je ressens comme une sorte de résonnance entre ces œuvres qui se mêlent aussi bien que les trois mains qui les font naître. J'aime leurs univers qui me font penser à Bruegel et Escher des références pour moi.

Simon Bureau


vendredi 19 octobre 2012

Robert Crumb au Musée d'Art Moderne de la Ville de Paris



De l’Underground à la Genèse

Dès l'entrée de l'exposition Robert Crumb nous fait pénétrer dans son intimité en nous faisant découvrir ses toutes premières sources d'inspiration, sous-verres. Il nous présente sa collection personnelle de magazines d'enfance, des albums de Picsou des années soixante écornés, usés et jaunis à force de manipulation. « Ce sont mes premières sources d'inspiration, celles qui m’ont poussé à faire du dessin ».

L’immense première salle regroupe de nombreuses planches publiées dans le magazine « Zap » et « Foo »  vers la fin des années 1960. On y rencontre ses personnages emblématiques comme le chat Fritz, Mr Natural, ou Eggs Acley, la plupart naquirent sous l'effet du LSD quand Crumb perdait confiance en lui. Déjantés et sans gêne, ils reflètent les désirs pervers de leur créateur, ici Fritz et son ami dévorent une femme-poule après l’avoir violée ; Mr Natural s’interroge sur les dérives des hommes. Les spectateurs se retrouvent troublés par une histoire complètement loufoque et malsaine confrontés à un dessin simplifié qu'on a plus l'habitude de trouver dans les magazines pour enfant.

Le génie de Crumb se développe dans cela, l'appel à des codes déjà connus et reconnus, confronté à des histoires sordides réveillant nos consciences adultes. Dans la seconde salle, on retrouve des œuvres plus engagées, la couverture du numéro  « Actuel » contre l'avortement sauvage, les différentes couvertures du New-Yorker dont celle jamais publiée sur le mariage gay, ses illustrations d'Harvey Pekar sur les jazzmen de Cleveland. Tout nous rappelle l'engagement qu'avait Crumb dans la société.

Aussi la troisième salle réunissant toutes les planches de la genèse on y découvre un trait plus recherché et poussé mais pas moins personnel. Elle nous rappelle l’éducation stricte qu'il a reçue chez les sœurs durant son enfance néanmoins l'auteur avoue en effet n'avoir pu en faire une œuvre satyrique. Cependant, son style très brut nous révèle une histoire très violente et particulièrement cruelle du premier livre de la bible.

L'exposition se finit par une dernière salle où s'exposent différentes illustrations et études de modèle féminin, femme fatale ou dominatrice, toutes différentes dans leurs morphologies et leurs comportements on peut y voir autant de complicité que de crainte dans ces différentes femmes. Cela est d’ailleurs mis à l'honneur à la fin de cette exposition, le dernier cadre nous permet de voir,  un mot dédiant cette exposition à Aline.




Carole Pêcheur