vendredi 25 novembre 2016

Galerie Gaïa - Artiste divers - 4 rue fénélon, nantes

Galerie Gaïa,
4 Rue Fénélon


Au détour d'une rue, à deux pas de notre chère école des Beaux-Arts, se trouve la galerie Gaïa. Bien souvent je passais devant la devanture, regardais avec envie, sans pour autant prendre le temps d'y rentrer. Pourtant, le nom m'inspirait grandement, et chaque fois j'y trouvais du regard, bien des échos de ce qui me tient à cœur. Nombre de galeries porte le nom de son propriétaire. Mais ici, le titre de ce lieu est un véritable emblème de ce qu'il montre. Gaïa, rappelons le, est une déesse primordiale de la mythologie grecque. Elle est la terre mère, celle qui fit naître la première de toutes les formes de vie. Aujourd'hui, ce nom est plutôt connu comme l'un des sobriquets de notre planète terre. Bref, cette appellation mène à un rapprochement logique de ce qui se rapporte à la nature.
Et cette galerie fait bien honneur à ce thème qu'évoque l'illustre Gaïa, sûrement n'a t-il pas été choisi par hasard. On y fait l'éloge de la faune et de la flore, de l'animalité, des forces élémentaires. Sous des formes inédites, leurs lignes se dévoilent d'une autre façon, sous un jour nouveau.

On y trouve des œuvres de toutes techniques : peinture, joaillerie, sculpture, installation, photographie...

Dès l'entrée, une illustration capte le regard. Au dessus de nos têtes, une peinture à même le plafond se déroule, d'un bleu électrique, œuvre du graffeur Kazy Usclef. On croit y voir Gaïa, flottant dans l'abîme accompagné des astres.



Dans cette même salle, on découvre également les peintures de Franco Salas Borquez, représentation réaliste de mers déchaînées, en un cadrage qui ne laisse entrevoir que l'écume et peut-être dans le lointain, dans un bout de la toile, un ciel nocturne. L'océan est maître, les flots noirs nous engloutissent.



Déposées ça et là dans les autres espaces, les pièces de Edith Basseville révèle un aspect particulièrement envoûtant d'une nature métallique. Une interprétation très humaine de ses sujets, par l'utilisation du métal, matériau d'un alliage artificiel. Malgré tout, la réalisation est d'une incroyable légèreté visuelle, d'autant plus que sa présence est doublée d'une sculpture immatérielle : l'ombre. Ces entrelacs fin de fils de fer éveillent une grande poésie, accentuée par la silhouette projetée de leur forme tout en creux et en finesse.



Dans un coin de la galerie, un petit fauteuil où l'on m'invite à m'asseoir, avec des magazines à disposition pour prendre le temps de lire, découvrir et s'imprégner du lieu. Des tableaux posés au sol, contre les murs, exposés sans être exposés, et d'autres choses dans les vitrines.


Leur site est très bien fourni et nous propose un glossaire des artistes passés et présents ainsi que leurs œuvres.


La galerie Gaïa nous expose sa propre faune et flore.


Oriane Cavin.

Raymond Meeks - Furlong - Temple du Goût

Raymond Meeks

Furlong

Temple du Goût, 30 rue Kervégan, 44000 Nantes.

Raymond Meeks habite les murs d’une salle au Temple du Goût, de quelques pages soigneusement disposées présentant quelques clichés noir et blanc.
L’artiste apporte une attention particulière à un lieu de baignade près de chez lui à Durham dans l’état de New York et s’inspire de gestes dûs au hasard. Il essaie de comprendre l’atmosphère dans laquelle il se trouve, capturant un mouvement, une expression.

Le choix de présentation de l’artiste est tout aussi intéressant que la photo en elle-même.
Le terme « Livre d’artiste » prend tout son sens dans la qualité de son travail.
Le choix du papier, la taille et la disposition, comme sa découpe expose l’architecture de la photographie.
La perspective et l’encrage de la photo soulignent le caractère de celle-ci.

Alors qu’aujourd’hui le travail de mise en page est traité le plus souvent par informatique, Raymond Meeks quant à lui, va explorer la création et l’assemblage de ces « books », à la main, feuille par feuille, ne laissant aucun détail se faufiler.





Edwin Blandin

mercredi 23 novembre 2016

Icônes. Trésors des réfugiés, Musée d’Histoire de Nantes - Château des ducs de Bretagne, Nantes.

Du 2 juillet au 13 novembre.


L’exposition met à l’honneur les migrants et les réfugiés, sujet sensible d’actualité. Mais il ne s’agit pas des migrations actuelles mais de celles engendrées par le conflit gréco-turc entre 1919 et 1923, qui à la suite du traité de Lausanne en juillet 1923 impose des échanges de populations pour des raisons religieuses.
Ainsi, lorsqu’on arrive dans la cour du château, le visiteur se retrouve face à l’oeuvre de Kalliopi Lemos, Promesses, un ancien bateau de migrants recouvert de Tamata, des offrandes votives faites à la main devant assurer la protection de son auteur et de sa famille. Ce qui nous renvoit aux icônes exposées à l’intérieur qui sont aussi des objets sacrés réalisés à la main et devant assurer protection. La différence est que l’objet emporté pendant le voyage du réfugié sert de lien entre l’ancienne et la nouvelle patrie.
En tant que regardeur, il était très intéressant de voir tous ces objets réalisés à la main qui pourraient être les prémices du Do It Yourself et notamment ayant dû inspiré la culture fanzine. La valeur historique ajoute de l’intérêt à la déambulation dans le musée et amène une réflexion sur un sujet omniprésent dans notre actualité qui semble sans arrêt être mis à distance : les réfugiés. Ici aussi tout est mis à distance et on en reste aux représentations, aux couleurs et aux techniques qui sont loin d’être sans intérêt alors que cela pourrait ouvrir des discussions et des parallèles sur notre actualité.


Benjamin FERNANDEZ.

vendredi 18 novembre 2016

Nunuche, MAZZACCIO & DROWILAL - L’atelier, 14 rue Paul Bellamy, 44000 Nantes.

Du 16 septembre au 16 octobre 2016. 

http://www.welivehere.eu

 

MAZACCIO & DROWILAL est un groupe d’artistes travaillant le collage et notamment la réappropriation d’images.
Pour le travail Nunuche, ils reprennent une collection d’enfance d’Elise Mazac dite Mazzaccio pour la détourner. Celle-ci collectionnait les papiers essuie-tout à motifs. Pour ce travail, le groupe d’artistes reprend cette collection pour y incorporer des personnages nus, à la même échelle que ces motifs.
Nunuche confronte donc des jeux d’échelle, de textures et de situations. En effet, les nudistes sont insérés dans des situations plus ou moins absurdes : à côté de bonhommes de neige vivants, faisant la course avec des animaux, assis sur des souches d’arbres admirant des glands et des feuilles, ou ratissant la terre près d’arrosoirs et de champignons géants.

Le protocole et la réalisation humoristique sont intensifiés par l’accrochage du travail. Les essuie-tout sont exposés dans des cadres tels des objets intimes et précieux, accompagnés d’agrandissements : les détails du travail n’échappent pas aux spectateurs. Ceux-ci peuvent donc mieux apercevoir les défauts de découpages, les saletés et imperfections de l’essuie-tout.

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Nunuche, Mazaccio Drowilal.




Clotilde BEAUTRU.

Ma vie est plus belle que la vôtre, Romain Leblanc - Le Temple du Goût, 30 rue Kervégan, 44000 Nantes.

Du 16 septembre au 16 octobre 2016 


Au Temple du goût, un seul mur presque furtif est attribué à Romain Leblanc pour l’exposition Heureux Qui… Les spectateurs s’arrêtent et sourient face à ce mur. Avant même de voir ce travail, je l’apprécie déjà.
Sur ce mur, une multitude de selfies sont présentés à partir de ‘scroll’ de la page Facebook de Romain Leblanc. C’est le premier décalage qui me fait sourire à mon tour : Ma vie est plus belle que la vôtre est la présentation d’un ‘mur’ Facebook sur un mur d’une salle. Et celui-ci ne laisse pas in-différent : les selfies sont très intimes, trop intimes et trop laids. Pour un spectateur qui a l’habitude de voir de nombreux selfies de personnes qui essayent de s’améliorer physiquement grâce à des techniques étranges mais usuelles (lever le visage pour rallonger le cou, cul de poule afin d’affiner les joues), Romain Le Blanc perturbe en se montrant sous son plus moche visage, un sourire béat et contagieux.
* je prends un selfie devant ses selfies en l’imitant.*
D’autant plus dérangeant qu’aujourd’hui, tout le monde a Facebook (même ma grand-mère), et l’on sait tous qu’il ne faut pas mettre n’importe quoi sur ce réseau social : tout le monde peut le voir. Romain Leblanc en joue. Il est très à l’aise à côté de ses tartines, avec ses grimaces et ses amis nus. Les spectateurs se moquent de lui, mais n’est-ce pas Romain Leblanc qui se moque de nous?
* je regarde mes photos Facebook…il est vrai que je n’ai pas toujours l’air maline *
Finalement Romain Leblanc interroge par l’humour la question du narcissisme dans notre société et surtout, je pense, chez les jeunes.
* le lendemain je lui envoie mon selfie car je pense avoir compris * 

https://www.festival-qpn.com/copie-de-1-laurent-hasse-3 
https://www.facebook.com/profile.php?id=100004609004934



Clotilde BEAUTRU.

Luca Gilli, Les chambres blanches - Galerie Confluence 45 rue du Richebourg, Nantes.

http://galerie-confluence.fr/

Jusqu’au 23 décembre 2016.


Dans le titre de l'exposition « Les chambres blanches », le photographe Lucas Gilli nous parle déjà de l'intime. La chambre, espace d'imagination personnelle, de fluctuation de l'esprit.
Cependant, la Galerie Confluence nous présente ici une sélection de photographies prises lors des travaux aux Beaux-arts de Nantes. Nous nous retrouvons donc du point de vue d'un homme, au milieu de ce chantier.
Ces photographies semblent nous parler silencieusement. Ce silence je l'avais déjà ressenti dans les dessins de Tatiana Trouvé.
Les objets présents se détachent de leur fonction principale. Ils sont ici un réservoir de formes, de couleurs et de texture. Leur présence nous permet une identification. Un repère.
Ces repères prennent leur importance dans ces espaces où le sol et les murs se confondent. La surexposition permet la création d'une enveloppe lumineuse, éblouissante, qui fait vibrer et naître une infinité de nuances de blanc. À l'image de l'œuvre de James Turrell, l'espace tout entier devient sculptural.
Le point de vue du photographe et quelques éléments architecturaux nous permettent une identification supplémentaire. Ainsi nous nous sentons seuls, figés dans cette chambre à la porte close. L'atmosphère est suspendue mais elle n'est pas effrayante. Elle libère des limites et permet un voyage vers un monde intérieur, spirituel.
L'exposition est réalisée en partenariat avec les Amis du musée de Beaux-arts de Nantes et l'Atelier. 



Marie DUPERRON.

RUN RUN RUN - à la Villa Arson, Nice.

www.villa-arson.org

Exposition du 2 octobre au 30 décembre 2016.


RUN RUN RUN est une exposition autour de la notion d’Artist-Run Space (des lieux inventés par les artistes pour les artistes) conçue par 22 collectifs et 120 artistes d’Europe et d’ailleurs, transformant la Villa Arson en vaste atelier de création et d’expérimentations. Ce projet est réalisé à l’occasion des 20 ans de La Station (Nice)
J'ai trouvé l'exposition très diversifiée mais les salles sont chargées d’œuvres et les indications concernant ces dernières ne sont pas toujours évidentes. L'avantage du lieu est qu'il est vraiment spacieux, modulable et dispose de plusieurs niveaux avec de grandes salles lumineuses. Mais j'ai trouvé la scénographie de l'exposition très spéciale, presque dénuée de logique, alliant les œuvres d'un collectif d'artistes à un autre sans qu'il ait un sens évident.
La notion d'Artist-Run Space, que je ne connaissais pas, m'a davantage intéressée. Ce sont en fait des lieux qui, pour la plupart, font coexister des ateliers d’artistes et des espaces d’exposition.
La plupart des artistes exposés ont étudié à la Villa Arson, quelque chose que j'ai vu comme un retour aux sources et d'une certaine manière un aboutissement et une reconnaissance face à cette institution qu'ils ont connue.
Ce que j'ai particulièrement apprécié était de découvrir la diversité des œuvres et univers des différents collectifs d'artistes et de les voir coexister, chose qui reflète l’esprit généreux et transversal des Artist-Run Spaces.
 
Collectifs exposés :
ATELIER EXPÉRIMENTAL (Clans)
CAN (Centre d’art de Neuchâtel – Suisse)
CLOVIS XV (Bruxelles – Belgique)
D.A.C (Dolceacqua arte contemporanea – Italie)
FONDATION RENÉ D’AZUR (Nice)
IN EXTENSO (Clermont-Ferrand)
La BF15 (Lyon)
LE BON ACCUEIL (Rennes)
L’ENTREPRISE CULTURELLE (Paris)
L’ESPACE D’EN BAS (Paris)
LE WONDER (Saint-Ouen)
LIEU COMMUN(Toulouse) / ZEBRA 3-BUYSELLF (Bordeaux)
LM (Paris)
MACUMBA NIGHT CLUB ÉDITIONS (Paris)
MAIK ALLES GUTE (Berlin, Leipzig – Allemagne)
NUMÉRO 13 (Bruxelles – Belgique)
PALAIS DES PARIS (Tokyo – Japon)
RED DISTRICT (Marseille)
SNAP (Lyon)
TANK ART SPACE (Marseille) 

Jeanne CLAMENS

Home Stage de Jessica Todd Harper - Galerie Confluence, Nantes.

Quinzaine Photographique Nantaise


Galerie Confluence, visite du 22.09.16
En entrant dans la galerie, ce sont les regards que nous renvoient les photographies de famille de Jessica Todd Harper qui interpellent. Des regards froids qui semblent peu s’accorder avec la thématique de la QPN, le bonheur.
Harper photographie sa famille depuis la naissance de ses enfants. Elle réalise ainsi une mise en scène de son quotidien pour générer une atmosphère à la fois étrange et singulière.
C’est avec douceur qu’elle nous entraine dans son univers familial. Figés à la manière des scènes de genre flamandes, les personnages sont les piliers de ses compositions. Cependant son utilisation des lumières et des teintes sombres ajoute une part de mystère et de secret à ses clichés. Un calme assourdissant s’installe dans la galerie où l’artiste a choisi de narrer silencieusement les petits instants du quotidien.
Jessica Todd Harper nous donne ainsi à voir une forme de banalité des jours qui se suivent entre spontanéité et mise en scène. Ces photographies nous font observer une intimité étrangère. Elles nous renvoient à la sensation, malsaine ou du moins malaisante d’un voyeurisme latent qu’elle traduit avec tendresse.



Elise BERGONZI.

dimanche 13 novembre 2016

Galerie Mélanie Rio - Temps Moderne

« Temps Modernes » à la Galerie Mélanie Rio dans le cadre de la Quinzaine Photographique Nantaise. Du 16 septembre au 15 octobre 2016.

Les Photographies d’Ambroise Tézenas.

Dans le cadre de la QPN et sur la thématique du bonheur, Mélanie Rio a proposé dans sa galerie à Nantes un corpus de photographies traduisant le regard de quatre artistes sur les périodes de prospérité économique aux Etats-Unis, en Europe et en Chine. C’est dans cette galerie que sont donc réunies quelques-unes des photographies d’Ambroise Tézenas de la série Beijing, Theatre of the people.
Photojournaliste français, Ambroise Tézenas voyage en Amérique du Sud et en Asie notamment à Pékin dans les années 2000 où il photographie les « hutong » Ces espaces où la vie moderne n’a pas encore tout envahi. On peut voir dans ces clichés, les traces d’une précarité latente qui se prépare à être recouverte par les imposants gratte-ciels qui surgissent en arrière-plan. Ils sont visibles comme une menace pour un écosystème de traditions et de simplicité qui se joue dans les rues sombres et désertes de ces morceaux de villes insolites.
Le photographe choisit de nous donner à voir des architectures précaires dans une atmosphère de mystère et de secret accentuée par les lumières ponctuelles aux accents austères. Les couleurs sombres se répondent dans une opposition fluide oscillant entre les rouges dans le ciel et les verts au le sol. Elles soulignent ainsi le contraste entre les espaces modernisés de la Chine des JO de 2008 et ceux qu’ils n’ont pas encore engloutis. Les gravats laissés au hasard dans les rues, les déchets, les lumières tamisées des fenêtres et les vieilles enseignes de néon participent de la poésie et de la mélancolie de ces lieux qu’Ambroise Tézenas a su capter et donner à voir sans artifice.

Elise Bergonzi


Hutong à Jianguomen périférie de Beijing, Chine 11/2003.

mercredi 9 novembre 2016

Le Lieu Unique - Pedro Reyes - Disarm (mechanized)

Disarm (Mechanized)
Pedro REYES
du 21 octobre au 27 novembre 2016
au LU (Lieu Unique), 2 quai Ferdinand Favre à Nantes

Dans la grande pièce blanche d'exposition à l'étage, le Lieu Unique présente en ce moment même Disarm (Mechanized), une oeuvre sonore de l'artiste mexicain Pedro Reyes.

Cette grande installation mécanique présente d'étranges instruments de musiques, reliés entre eux et amplifiés qui jouent par intermittence des petites phrases afin de former une mélodie d'ensemble. Le spectateur est invité à circuler autour de cet orchestre automatique et à se rapprocher afin de comprendre ce qui produit ces sons. La surprise est grande et ferait presque reculer ce dernier lorsqu'il comprend que ce sont des armes à feu qu'il a sous les yeux. En effet, Pedro Reyes a réutilisé, modifié, re-sculpté des revolvers, fusils et mitraillettes afin de composer un ensemble d'instruments de musique. Le spectateur inspecte alors sous un autre angle ces appareils de ferraille et l'impressionnante quantité d'armes dressées droit sur lui dans son environnement. La musique qui semblait alors à l'entrée inoffensive avec ces « presque » batterie, xylophone, marimba, violoncelle, basse, carillon...prend alors un tout autre sens.
Le morceau, composé par et pour ces instruments et présenté au LU, est régulièrement entrecoupé de silences, tout en restant temps rythmé et plein d'énergie. Il mélange des sons quasiment électroniques, rappelant ceux d'un synthétiseur, avec des sons de musiques tribales : telle l'alliance de la technologie avec des impulsions traditionnelles et naturelles. Les espaces de vides au sein de la composition musicale permettent le déplacement des spectateurs et à la quête de la provenance des sons.




Associer l'univers de la mort à la musique déroute, mais le fait de transformer ces armes qui ont servi à tuer, leur offre une sorte de rédemption, et une seconde vie, bien meilleure en tant qu'instruments de musique. Le son, caractéristique et traumatisant que déclenche une arme en fonctionnement n'aura plus jamais lieu avec celles-ci.

Cette installation est la continuité de deux œuvres précédentes de Pedro Reyes. Celui-ci avait commencé en 2008 avec Palas por pistolas à Culiacàn, une des villes les plus dangereuses du Mexique par la violence qui y règne. L'artiste y avait collecté 1527 armes à feu grâce à la simple donation des citadins de Culiacàn qui recevaient en échange un coupon d'achat dans les magasins locaux. Avec cet arsenal qu'il a fait fondre, 1527 pelles ont été forgées en partenariat avec le jardin botanique de la ville afin de servir à faire planter 1527 arbres à des institutions, des associations, des écoles, etc... Ce désarmement avait pour but de ré-utiliser ce qui avait servi à provoquer la mort, en un outil pour donner la vie.
Ensuite, en 2012, le gouvernement mexicain propose à Pedro Reyes de récupérer le métal de 6700 armes prêtes à être détruites. Ce dernier accepte, et décide de transformer ces fusils et pistolets en instruments de musique. C'est la naissance d'Imagine, où il a été question de recréer des instruments « traditionnels » d'orchestre qui sont joués aujourd'hui lors de concerts-performances. Des musiciens ont ainsi pu reprendre avec ces instruments le tube mythique et pacifiste Imagine de John Lennon (https://www.youtube.com/watch?v=rgMW2VuGItM).

Dans l'exposition, deux vidéos près de l'entrée complètent l'installation sonore. L'une présente la destruction par l'état mexicain des armes confisquées. Celles-ci sont broyées, désossées... afin de ne plus être qu'alors un simple tas de ferraille. Mais symboliquement cette action est lourde de résonances lorsque l'on sait que chaque revolver a été utilisé pour sa fonction première.
La seconde vidéo est une démonstration d'un morceau qui a été programmé sur ces mêmes instruments de l'installation. Elle nous offre une autre mélodie que celle présentée dans la salle, plus énergique, à la manière d'une répétition d'un groupe d'amis en studio. Ce mini clip dévoile ainsi d'autres facettes de ces instruments et de cette performance mécanisée. Cependant, si Pedro Reyes ne présente cette vidéo qu'en « plus » de l'installation c'est dans la volonté de montrer réellement les instruments, et de les faire jouer devant un public qui doit vivre et appréhender cette combinaison au premier abord inadéquate avec les armes à feu pour comprendre son propos.





La musique est la première des communications universelles depuis tout temps, et dans notre monde d'aujourd'hui, il est malheureusement admis que la guerre et la violence en soit une également. Pedro Reyes combat l'industrie de la mort, ainsi que la banalisation des armes dans les jeux vidéo ou les films qui sont les premiers acteurs invisibles du trafic d'armes, et de la violence dans le monde où le nombre d'homicide est affolant. Il nourrit l'utopie d'un monde sans arme et souhaite enclencher une prise de conscience sociale et psychologique grâce à ses travaux afin d'améliorer notre société.

Pour finir, cette installation mélange sculpture et musique, et du même coup les nouvelles technologies. Ni bonnes, ni mauvaises, il faut savoir les utiliser à bon escient comme nous le montre l'artiste. Cette exposition, présente plastiquement une musique mécanisée, industrialisée et peut renvoyer à ce genre de musique actuelle en plein essor. Certes, ce n'est sans doute absolument pas le propos de l'artiste, mais j'y retournerais bien une seconde fois afin de me pencher vers d'autres pistes comme celle-ci et ré-explorer cette œuvre sous un autre angle.

Pour en voir plus et noter qu'il ne vous reste que quelques jours pour profiter de cette exposition : http://www.lelieuunique.com/site/2016/10/21/disarm/



Mathilde Blieck

Le Lieu Unique - Pedro Reyes - Disarm (mechanized)

Disarm (Mechanized)

Du 21 octobre au 27 novembre 2016, le lieu unique présente une installation sonore de
l’artiste mexicain Pedro Reyes.
L’exposition prend place dans une unique salle où se mélangent d’étranges objets en métal évoquant des instruments de musique.
C’est alors que les premiers sons émergent de l’installation que l’on comprend de quoi il s’agit : on peut voir une harpe, un piano, un tambour ou un xylophone.
Visuellement intéressants, on prend plaisir à se balader autour de ces automates musicaux.
Mais c’est une fois qu’on lit la note d’intention de l’artiste que toute l’installation prend son sens.
Pedro Reyes participe depuis une dizaine d’années à des programmes de désarmement en travaillant à la transformation de ces armes à feu en projet artistique.
Ainsi, pour Disarm il a utilisé revolvers, fusils et mitraillettes et a complètement réussi à faire disparaître leur image morbide, liée directement à la mort.
J’ai été très impressionnée par la capacité de l’artiste à donner un nouveau sens à ces objets meurtriers, les transformant en réels instruments de musique et non pas de destruction.
Dès la première note de musique, l’image de l’arme à feu disparaît totalement de
l’esprit et laisse place à un joli dialogue entre corps musicaux.
C’est donc le matériau utilisé et la technique qui m’ont le plus touchée dans cette exposition. Même si le rendu final est ludique et amusant, le processus de création et la matière première sont aussi intéressants qu’originaux.
Et en plus, participer à la baisse du nombre d’armes à feu dans le monde par son travail artistique est un beau geste, non ?
Je recommande donc vivement cette expo, c’est court, c’est gratuit et c’est au lieu unique
A Nantes.

Pour plus d’informations : http://www.lelieuunique.com/site/2016/10/21/disarm/

Léonie Goron

Galerie Confluence - Jessica Todd Harper – The Home Stage

Jessica Todd Harper – The Home Stage
Galerie Confluence. Quinzaine Photographique de Nantes



Lors de cette exposition, j'ai pu découvrir le travail de l'artiste Jessica Todd Harper, constitué d'un ensemble de photographies.
Un unique sujet semble unir ces photographies : celui du cercle familial et de thèmes secondaires comme la maternité, les générations, l'amour familial, le patrimoine.
Dans ces œuvres, on rencontre son environnement personnel, intime.
Avec ces photographies, elle a voulu représenter son évolution, le changement qu'est la maternité dans la vie d'une femme, ce qui d'après ce qu'elle a écrit, l'a profondément changée. L'artiste ne place absolument pas le spectateur à distance. Elle nous invite.
Les enfants sont à l'aise du fait d'être photographiés par leur mère (ou une personne du cercle familial). Les regards des enfants sont puissants, intenses, tandis que l'on ne croise jamais le regard des adultes. Les personnes posent à plusieurs (deux au moins). On remarque l’intention de l’artiste d’évoquer le partage familial. On ressent fortement son sentiment d'amour envers sa famille qu’elle arrive à transmettre à travers la photographie. Cette famille a beau nous être tout à fait étrangère, on ressent une sorte de compréhension de son amour.
Le lien entre les générations est fortement représenté : avec les plans (Ex : enfants au premier plan, puis parents, grands-parents et photos ou peintures d’ancêtres encadrés aux murs).
Les plans sont d'ailleurs traités de façon très intéressante, et sont très importants dans ses compositions. Ainsi que les objets : l’opposition entre les vieilles photos, les broderies et les jouets d'enfants. L'artiste veut sûrement représenter la transmission, et le fort lien familial et générationnel.
En fonction de la scène qui se déroule devant ses yeux, elle la met en scène ou laisse faire le hasard. Elle joue avec la lumière, le flash, la disposition des personnes.
Dans ses photographies, on voit clairement l'influence très intéressante de la peinture flamande, avec les scènes d'intérieur et le traitement de la lumière, donnant une intensité encore supérieure. Le traitement de la photographie est très beau, grâce à la densité et la colorisation, ainsi que le traitement de la lumière. Cette lumière amène un aspect presque divin, sacré, protégé.

La seule chose qui pourrait m'avoir légèrement déçue, c'est l'abstraction (l’absence de ?) du désordre.
Dans une famille avec des enfants, il y a toujours des aspects plus « chaotiques ». Ici, on semble nous les cacher en nous présentant seulement une famille modèle et calme, vivant dans un cadre idyllique et parfaitement ordonné.
L'artiste fait ici totalement abstraction des mauvais aspects. Vision peut-être trop embellie.
On ressent peut-être un trop plein (?) de maturité, une accalmie, un trop plein (?) de sagesse (issu de la maternité?), qui virent à un aspect peut-être trop bourgeois.

Pour conclure, j'ai trouvé cette exposition magnifique, avec des images intenses et touchantes, de beaux traités photographiques.
L’artiste a réussi à donner un aspect presque divin à ces scènes de vie quotidienne. Mais peut-être aurions-nous aimé voir les dessous de ces mises en scène qui semblent trop sages et parfaites.



Line Bourdoiseau

Le temple du goût - Romain Leblanc - Ma vie est plus belle que la votre

Le temple du goût
Romain Leblanc
Ma vie est plus belle que la votre



Lors de l'exposition au Temple du goût à l'occasion de la quinzaine photographique, j'ai pu découvrir le travail de Romain Leblanc : « Ma vie est plus belle que la vôtre ».
Ici Romain Leblanc a travaillé sur la photographie amateur et le selfie, et plus particulièrement sur le sujet du narcissisme dans le selfie.
Pour cela Romain Leblanc s'est mis en scène dans une série de publications sur le célèbre réseau social « Facebook ». On le voit par exemple avec une liasse de billets, dans un bain moussant, nu dans sa salle de bain, ayant fait un gâteau,...
Lui bien sûr, caricature ses selfies, ne travaillant pas ses poses, ne les embellissant pas avec des filtres et se moquant bien de son apparence, contrairement à un selfie normal.
Dans ces mises en scène il a voulu critiquer le fait que notre bien-être soit devenu dépendant du désir de plaire, de séduire, d'être aimé et de convenir aux autres.
Il critique le fait que dans la culture actuelle ce soit un passage obligé, pour crier à tout le monde :
« Je suis normal, j'ai des amis, je fais des voyages et ma vie sexuelle existe ».
Il dénonce que le seul moyen de se représenter actuellement soit de montrer à tout le monde qu'on convient à la société, ou pire encore, que l'on est au-dessus des autres : qu'on sort plus, qu'on a des jambes plus fines, qu'on va plus au restaurant, qu'on voyage plus, qu'on bronze plus, qu'on a des dents plus blanches...
Il dénonce le selfie comme ce qu'il est : un stigmate du narcissisme contemporain et toute cette machine, comme un abandon du contact humain, pour un rapport virtuel, irréel et un individualisme grandissant, à vouloir montrer que l'on est mieux.
Mais il critique aussi cette utilisation du selfie, presque obligatoire, comme un enfermement dans la société.


Il est parfois difficile de dénoncer ce dont nous faisons aussi partie, mais la leçon de Romain Leblanc est intéressante.
Et je trouve ce travail d'autant plus pertinent qu'il rentre dans le cadre du sujet « Heureux qui... », est-ce vraiment ici un idéal du bonheur pour les nouvelles générations qui tendent de plus en plus à s'illustrer comme cela ?


Line Bourdoiseau

Blockhaus 10 - MYKOLA RIDNYI - Perspective pour hier


Blockhaus 10
MYKOLA RIDNYI Perspective pour hier
Exposition du 17 septembre au 16 octobre 2015


J'ai trouvé l'exposition de l'artiste ukrainien Mykola Ridnyi captivante. Lors de cette exposition, nous avons en effet pu observer différentes pièces, mais ayant toutes un lien avec une certaine violence, un rapport à la guerre ainsi qu'à la société actuelle.

Tout d'abord « Blind Spot » ou cet ingénieux moyen de représenter le mécanisme d'auto-aveuglement humain en le comparant à une maladie ophtalmologique dans diverses photographies.
En effet, ici Mykola Ridnyi fait un rapprochement entre un phénomène pathologique qui rend incapable de voir pleinement ce qui se passe autour de nous et nous mène à construire une image manquante de la réalité, petit à petit absorbant toute réalité jusqu'à une obscurité totale - à l'attitude que nous adoptons au sein des sociétés modernes et qui devient un processus d'autodéfense nous aveuglant et nous persuadant d'une réalité inexacte.
Pour représenter les effets de notre auto-pathologisme il reprend des clichés provenants de rapports concernant la guerre à l'est de l'Ukraine et les obscurcit presque totalement à l'aide d'encre, moyen plastique très intéressant.

Ensuite « Shelter », vidéo tournée dans l'un des abris souterrains réquisitionnés dans le cadre d'un programme scolaire appelé « entraînement de pré-service », représente la réutilisation des abris construits lors du conflit américano-russe, et de la paranoïa collective en résultant, par des enseignants et élèves qui ne semblent pas se préoccuper de la situation politique de leur pays, mais seulement de l'importance de l'engagement militaire au sein de la patrie, illustration encore une fois d'un aveuglement benêt, ridicule, risible. On peut y voir des élèves s'entraîner à charger le plus rapidement possible une arme, des cours de tirs, des affiches d'étude de la contenance d'une balle et entendre des paroles patriotiques.

Puis « Under Suspicion », série de photographies défilant à l'aide de diapositives, représentant la suspicion et la sur-surveillance du gouvernement envers chaque citoyen, chacun devenant un potentiel suspect, en fonction des détails qui l'entourent. Pour représenter cela, il fait défiler des clichés de scènes de la vie quotidienne prises dans l'espace public, puis avec des inscriptions au stylo, il y entoure les objets et individus potentiellement suspects.

En face de cette installation était diffusée une vidéo : « Regular places ». Cette vidéo représente les fantômes de la violence qui a pu éclater dans des lieux qui semblent aujourd'hui banals, des lieux où il est aujourd'hui impossible de deviner les émeutes, les affrontements à coup de batte de baseball, les sanctions publiques, les humiliations et les exécutions qui ont pu s'y dérouler. Mykola Ridnyi y fait revivre ces fantômes, en transposant sur ces images d'une vie quotidienne banale, paisible, les sons d'affrontements, de cris, de douleurs. On peut y entendre des phrases très éloquentes comme : « Mort aux ennemis », « Putain de pédés », « Ils tabassent des gars ! Ils tabassent des gars les mecs ! », « Ils ont été attaqués, un vieillard est tombé ! », « Tue-le ce chien de russe ! », « Regarde ! Ils lui ont fracassé la tête ! », « Mon dieu quelle horreur ! », ainsi que des cris d'horreur et de peur. A côté des images paisibles, les cris et les voix de ces fantômes nous choquent.
On en vient à réaliser l’étendue de cette horreur, mais aussi à l'imaginer dans notre rue, notre place, notre environnement.


Et pour finir, la vidéo « Forteress », que j’interprète un peu comme l’apogée, le point final de l'exposition. Car tout ce que l'on nous a présenté auparavant faisait appel à notre interprétation, on nous voilait les choses pour mieux les regarder. Ici on nous lâche les images. On peut voir des hommes armés, des barricades, des groupes de défense, de grands feux, des émeutes, les énormes dégâts des lendemains, des châtiments, des humiliations, des combats,...
Toutes ces images sont commentées par des extraits, des citations de textes sur l'histoire médiévale.
Ils comparent le développement du néolibéralisme contemporain dans les pays de l'est avec celui du système des anciennes monarchies en Europe :

Les hommes qui se battent à l’extérieur du château, les bruits des affrontements, des béliers, de l'huile bouillante et les barons à l'intérieur, gros, opulents, riches, protégés par une horde de soldats et écoutant de la musique (Opposition au bruit de la guerre à l’extérieur).
Ils illustrent aussi la reprise de rites des guerres passés : tenues, noms, cris,..
Mais surtout le mouvement contre les « privilèges seigneuriaux », les privilèges des systèmes du moment en faveur des dirigeants.

Pour conclure j'ai trouvé cette exposition très enrichissante, de par ses dénonciations, mais aussi de par les moyens plastiques utilisés pour y arriver.
Mykola Ridnyi a tout à fait atteint son but de dénonciation de la propagande, la manipulation, la répression, l’oppression, les processus de gouvernance, et surtout la manière avec laquelle l'humain peut occulter une réalité. Il mélange les œuvres qui représentent symboliquement ce qu'il veut exprimer comme « Blind Spot » avec les œuvres, qui grâce a l'utilisation du style documentaire et des images de surveillance imposent une brutale réalité.
Il dénonce et demande un questionnement de nous-mêmes, de notre société.
Cet artiste m'a plu, m'a touchée et m'a aussi montré une vérité choquante.

Line Bourdoiseau

mercredi 2 novembre 2016

Mykola Ridnyi, Perspective pour hier - Blockhaus DY10, Nantes.

Mykola Ridnyi, artiste ukrainien nous présente dans son exposition « Perspective pour hier » ses interprétations plastiques des tensions sociales et politiques présentes il y a peu en Ukraine.

A travers photos, vidéos et diapositives il oppose le climat actuel ukrainien face à celui d'il y quelques mois. En effet la population a participé à de nombreuses manifestations et émeutes, excédée par un pouvoir corrompu et voyant leurs perspectives d'avenir s'effacer.

L'artiste va alors dénoncer ce contexte socio-politique tout en faisant le paradoxe de notre vision qui est occultée par une fausse réalité.
Tout d'abord dans son premier travail « Blind spot » il va imager une zone vide présente dans notre vision entre l’œil gauche et l’œil droit, appelée tâche aveugle. Donc d'après lui nous sommes en incapacité de voir tout ce qui se passe autour de nous, et nous construisons une fausse idée de la réalité. Pour répondre à ce propos il a réalisé une série photographique qui transpose métaphoriquement ces troubles oculaires. Il place à différents endroits de ses photos une tache noire réalisée avec un spray acrylique ce qui permet de donner, d'après moi, une seconde dimension à l'image qui représenterait l'oubli, l'obscuration de notre mémoire. Ainsi, il crée une nouvelle forme de clair-obscur photographique qui ne laisse voir ou deviner que ce que notre cerveau décidera. Cette série est le travail qui m'a le plus interpellé dans l'exposition, autant du point de vue du fond que de la forme.

Mykola Ridnyi a évidemment réalisé d'autres travaux dans cette exposition comme trois vidéos ; on y voit la population révoltée contre le système politique, un abri réhabilité en système d'auto-défense appelé « entraînement de pré-service » ou encore les habitants essayant de reprendre le cours de leurs vies, tout en essayant d'effacer de leur mémoire les événements passés.

En bref, l'artiste soulève de nombreuses questions sur notre vision de la réalité : Sommes-nous réellement objectifs face à ce que nous voyons ? Notre vision nous influence-t-elle sur notre façon d'agir ?

Léo BUREAU.

Galerie TrES. - 3 rue Bossuet, Nantes.



http://galerietres.com/

Exposition de mi-septembre à mi-octobre.

JI Chang-Rim, Jane PLANSON, GWENHAËL, LEE Jeong-Hyup.


Cet article aura pour sujet la galerie tenue par l'artiste peintre coréen, et docteur en arts plastiques de l'université de Rennes 2, JI Chang Rim, ancien étudiant aux Beaux-Arts de Nantes.
Ji Chang-Rim m'a gentiment accueillie et m'a raconté l'histoire de quelques-uns des artistes exposés dans sa galerie.
Tout d'abord, Jane PLANSON est une artiste peintre de Rouen qui travaille surtout sur les personnages, et rarement sur les paysages. Cependant, elle a décidé d'apporter à Chang-Rim, lorsqu'elle est venue sur Nantes, trois tableaux de paysages et un d'un personnage. J'ai pu feuilleter le livre regroupant une partie de ses travaux pendant que Chang-Rim m'expliquait des petits faits sur l'artiste en question. Jane Planson utilise des pigments, de la cire et de l'huile dans ses toiles, mais elle a aussi travaillé sur du bois. Je trouve ses paysages assez mystérieux, et en même temps une impression de calme qui s'en dégage grâce à l'absence de personnages. Cela me fait penser au chaos, à l'annonce de l'arrivée d'une tempête. De plus, même dans ses peintures de personnages, il y a toujours, selon moi, cette forte aura ténébreuse. Son utilisation de la cire apporte un grand plus dans sa peinture.
On trouve également dans la galerie des travaux de Gwenhaël. J'ai personnellement et surtout énormément apprécié le travail avec les plumes qu'il a dessinées. Il crée une profondeur hallucinante. Les sortes de triangles qui se superposent apparaissent sous la forme de losanges, de rectangles. Le mouvement avec les plumes donne l'impression d'un envol et se détache des losanges : cela apporte un dynamisme, un mouvement à l'image et d'autant plus, de la profondeur.
Dans la galerie, deux travaux du galeriste coréen sont exposés. L'un est le premier provenant d'une série intitulée Le sentiment d'enveloppe de cinq travaux, c'est ce qu'il a présenté lors de son oral de fin d'études à l'école des beaux-arts de Nantes. Le second travail exposé est une peinture sur laquelle on peut voir des nuances de bleu. Des corps semblent se dessiner dans les mouvements laissés par les traces du pinceau. Une sorte de rythmique, une danse paraît se former.
On trouve également des céramiques coréennes du coréen LEE Jeong-Hyup. Très fascinantes, les céramiques sont recouvertes de motifs végétaux bleus et marron, des sortes d'arbres qui s'entrelacent. Je me sens sereine devant ces objets, et je dirais même, cela m'impressionne énormément, notamment la surface extrêmement lisse et brillante de la céramique et des motifs.

Chang-Rim, en plus de m'avoir raconté l'histoire autour de la céramique coréenne, m'a offert un petit livret très passionnant qui traite des peintures folkloriques dites « Min Hwa ». J'en suis ravie et l'en remercie beaucoup !

Une nouvelle exposition intitulée « Parfum d'éternité » dans la galerie de JI Chang-Rim a commencé le 11 octobre et se terminera la 25 octobre.

Jane PLANSON.


Céramiques coréennes, LEE Jeong-Hyup.


Gwenhaël.
Galerie TrES.
JI Chang-Rim (Le sentiment d'enveloppe, 1/5 à droite).

Myriame EL KHAWAGA.

Ma vie est plus belle que la vôtre, Romain LEBLANC. - Le Temple du Goût, Nantes.

Du 16 septembre au 16 octobre 2016.

Dans cette collection photographique amateur, Romain LEBLANC se montre au public de manière très amusante. Sur un grand mur, on aperçoit les publications qu'il a faites sur un réseau social. Cela m'a donné le sourire aux lèvres. On le voit dans des situations du quotidien : en train de se brosser les dents, en train de cuire du bacon, en train de lire un magazine, en train de repasser son linge, en train de poser devant le fessier de quelqu'un, et plein d'autres genres. Il paraît être idiot et va dans l'absurde, quitte à se prendre en selfie pendant sa visite chez le dentiste, et même dans son fauteuil avec sa télécommande. Je pense que la photo la plus hilarante, en plus de sa photo de profil sur laquelle il semble être non vêtu, est celle où il sourit, une tasse dans la main et les dents pleines de chocolat (je suppose que c'en est du moins je l'espère).
Un selfie de nos jours est censé mettre en valeur la ou les personnes qui prennent la photo. Or, sur les selfies de Romain LEBLANC, on est loin de pouvoir dire qu'il est sous son meilleur jour ! Comment ne pas rire de ses photos et surtout de lui : un homme banal qui semble faire l'idiot, sachant qu'il s'agit de photos publiées pour être vues par le public.
J’en conclus que ce travail de Romain LEBLANC critique la société très friande de réseaux sociaux.


Photographies de l'exposition.

Myriame EL KHAWAGA.

11ème Convention de Tatouage de Nantes

11ème Convention Tatouage Nantes – 7,8 et 9 octobre

Organisé par l’association Moby d’Ink
Dès l’entrée dans le parc de l’expo de la Beaujoire, le ton était donné. Une ambiance immersive plongée dans un son hard rock enivrant accompagné du bruit sourd des machines perçant la chair. Des visages crispés, filtrant la douleur devant une foule toujours plus enthousiaste. Une œuvre immortelle sur un mortel. Chacun son style, chacun sa façon d’habiter l’espace qui lui a été réservé. Certain préférant de vastes affiches tape-à-l’œil à la sobriété d’un stand sage et rangé. Les flashes encore disponibles jonchaient les tables. C’était amusant de se poser dans un coin du salon pour y observer la foule. Très éclectique. Presque binaire. D’un côté des hommes et femmes, des familles d’une classe sociale plutôt modeste grossièrement tatouées venant avec leur poussette écumer le stand à la recherche de la meilleure affaire. De l’autre, des artistes, bobos, dandys au style savamment étudié parcourant nonchalamment les stands chinant contact, inspiration, à l’affut de LA pièce qui compléterait au mieux leur univers si particulier. Des centaines d’ artistes tatoueurs ont enchaîné tout le week-end, venus du monde entier, au style aussi épars qu’inspirant. Sergio Villa, Ako, B. Parks, Bichon, Captain Plume… De l’old school, néoclassique, contemporain, gore… La richesse des univers présents était une source d’inspiration infinie. Toute la culture de cet art était à disposition. Des représentations coquines et des concours venaient rythmer l’ensemble. Des Streep-teases, du shibari, des danses et un présentateur aux tournures de phrases aussi improvisées que son style vestimentaire animait les concours. Le meilleur tatouage de la journée, le meilleur flash ou les tatouages les plus originaux. Et pour noter tous cela : trois juges aux critères de sélections aussi floues que le breuvage qui était devant eux. En conclusion, trois jours hauts en couleurs, intenses, uniques !

Melany Girou

Exposition au Blockhaus DY10, à la Zoo Galerie et au FRAC des Pays de la Loire

La Chronique Politique

+ Mykola Ridnyi - Perspective pour hier - 17.09/16.10
Blockhaus DY10, 5bis boulevard Léon Bureau, Nantes
+ Mediengruppe Bitnik Ft Adam Harvey - Welcome to Ecuator - 25.06/29.10
Zoo Galerie, 49 chaussée de la Madeleine, Nantes
+ Amar Kanwar - The Torn First Pages - 25.06/16.10
Frac des Pays-de-la-Loire, Carquefou

Perspective pour hier, d’un point de vue esthétique l’exposition fonctionne très bien. La série de photos présentées, Blind Spot, nous met subtilement dans le thème sans avoir lu le descriptif, puis au fur et à mesure de l’expo, nous comprenons réellement le sens des photos par rapport aux vidéos explicitement politiques. 
J’ai trouvé intéressant ces images bombées en noir au centre qui provoque un sentiment de frustration face à l’image qui se trouve derrière et dont nous ne pouvons qu’entrevoir que des détails. Ces taches m’évoquaient une tumeur, une gangrène qui grossit au fil des mois/années dans le cerveau. Puis en découvrant que l’exposition - les vidéos - était tournée principalement vers la politique, cela a renforcé ce sentiment en le mettant en corrélation avec ces "décideurs" qui peuvent être une gangrène pour leur pays.
Les vidéos présentées m’ont moins marqué du fait que j’ai trouvé que c’était un travail de reporter, il nous montre des images « déjà vues » aux infos/internet. Malgré la relation texte et image des vidéos, intéressante, j’ai trouvé que ce n’était pas exploité jusqu’au bout. Je suis resté sur ma faim.

Mais la dimension politique dans les expositions a toujours eu du mal à me captiver. Exemple : l’exposition The Torn First Pages d’Amar Kanwar au FRAC Pays-de-la Loire, mise à part la scénographie ambitieuse, le contexte culturel du pays m’était vraiment extérieur et je n’avais aucun moyen de m’immiscer dans cet univers. Faute d’information complémentaire et de descriptif, les images étaient là pour nous orienter mais même si on pouvait se douter que l’exposition était engagée politiquement, on ne pouvait vraiment pas savoir de quoi il était question réellement.

Welcome to Ecuador est une des rares expositions engagées qui ont réussi à captiver mon attention. D’une part parce qu’elle n’est pas totalement liée à la politique. Mediengruppe Bitnik se sert de l’affaire politisée de Julian Assange pour pouvoir produire et s’amuser. La démarche des artistes commence avant tout par un jeu d’enfant, tout simplement d'accéder à un endroit inaccessible comme l’intérieur d’une fourmilière. Par-delà le mapping du colis, ils parviennent à créer une forme graphique qui m’a fait penser à la méthode de travail de la « contre-productivité" de Julien Précieux, qui dans les mêmes années, a utilisé ce système pour pouvoir produire « Atelier de dessin » un diagramme de Voronoï. C’est cet objet (le colis) qui va mener à l’aboutissement de la plupart des productions de Mediengruppe Bitnik. Julian Assange’s Room et Parcel sont l’extension de leur projet, plus engagé puisqu’il permet de nous positionner/ prendre parti politiquement. En analysant sa chambre on se rend compte des conditions de vie d’Assange, soulignées par le dessin d’un de ses enfants. Cette pièce nous donne envie de nous intéresser à ce qu’il lit, ce qu’il aime, ce qu’il possède, qui il est. Toute cette curiosité nous fait devenir des protestataires en sa faveur (groupie d’Assange).

Thomas Gameiro

The First Torn Pages & A season outside de Amar Kanwar, FRAC Pays-de-la Loire.

www.fracdespaysdelaloire.com


Du 25 juin 2016 au 16 octobre 2016.

« How can I push my position if I do not demonstrate my strength without force? »
Comment puis-je avancer ma position si je ne fais pas la démonstration de ma force, avec la force ?
Voici l’une des questions majeures que l’on retrouve dans le travail de l’indien Amar Kanwar.
Pour the First Thorn Pages l’artiste nous présente dans un espace dépouillé une installation de 19 vidéos, témoignages de la dictature birmane et de la résistance qui s’y opposa.
Sa manière de projeter les vidéos, le projecteur placé face à nous derrière une fine feuille de papier laissant passer la lumière et simplement tenue par de petites pinces à dessins sur un cadre en métal noir m’a particulièrement marquée. Cela crée une ambiance solennelle mais apaisante.
Le lieu est comme un mémorial, en hommage à ces citoyens qui luttèrent contre l’oppression avec leurs moyens. Ce qui est intéressant c’est qu’il ne se dégage aucune violence de cette atmosphère me faisant penser au musée du mémorial de la Paix à Hiroshima : se souvenir, comprendre, pardonner mais résister.
C’est là que se situe l’enjeu du travail de Amar Kanwar, comme il l’explique dans le film « A season Outside » il lui fallait trouver une voie où il ne répondrait pas à la violence par la violence mais où il ne la fuirait pas non plus. C’est l’une des choses qui m’a touchée dans son travail, il semblerait qu’il ait trouvé sa voie dans l’Art : C’est sa résistance.
Visuellement c’est sublime, par de simple choix de cadrage ou montage, il crée des visuels très forts.

Diane CESCUTTI.

Performance : La fugue de Cebolang, Paradise, 6 rue Sanlecque, Nantes.

http://www.galerie-paradise.fr

Samedi 22 octobre 2016 

Jean-Marc Saint-Paul, Lyn Nékorimatè et Jean-Paul Labro.


Ces trois artistes ont été invités par la galerie tenue par Béatrice Dacher et Michel Gerson pour une performance de 30 min.

Une expérimentation sonore et musicale réalisée à partir d'un extrait du texte javanais
« Le livre de Centhini » traduit en version française par Elisabeth D. Inandiak.

Arrivée dans une pièce sombre, des matelas sur le sol pour s'assoir ou s'allonger. Une lumière dirigée sur chaque artiste. Jean-Paul assis sur une chaise à gauche, un micro devant lui. Lyn assise par terre à droite, micro sur le sol, manipulant son ordinateur. Jean-Marc est debout, au milieu des deux autres artistes, derrière tous ses instruments, quatre cloches, une guitare, une basse, un thérémine, une grosse caisse et d'autres petits bibelots.
La musique commence, sonorités numériques et instruments ancestraux se mêlant à la voix suave de Jean Paul. L'histoire commence...

"Cebolang, jeune prince errant à la recherche du gai savoir et de la conscience de soi part, vagabond céleste, sur les chemins de l'île de Java. Ses rencontres sont légions : grand magicien, femme ouléma, montreurs d'ombres, danseur réog, opiomane... tous instruisent le jeune homme et le révèlent à lui-même."

Pendant la performance, on observait quelques personnes allongées, fermant les yeux afin de savourer pleinement l'écoute. La musique parfois calme, parfois stridente, nous immerge sur l'île de Java. Lyn chantant et parlant parfois avec Jean-Paul nous offre une certaine légèreté à la performance.
A la fin, après ce voyage avec Cebolang, j'ai eu le sentiment que tous les spectateurs étaient envahis d'une sorte d'apaisement.
J'ai particulièrement adoré la performance du musicien Jean-Marc, travaillant des sonorités exotiques et exécutant des loops, se mêlant superbement avec les voix des deux autres artistes.

Marceau GORCE.