mardi 26 mars 2013

Alina Szapocznikow



Alina Szapocznikow

Du dessin à la sculpture

27 février – 20 mai

Centre Pompidou



J’ai découvert le travail de cette artiste polonaise il y a deux ans, en tombant sur le catalogue de l’exposition monographique qui venait d’avoir lieu au centre d’art contemporain de Bruxelles (Alina Szapocznikow – Sculpture Undone – 1955 -1972). À la fois dérangée et fascinée par ces étranges dessins et sculptures, j’avais très envie de les voir « en vrai ».
La petite exposition qui a lieu en ce moment au quatrième étage du Centre Pompidou ne m’a pas déçue. Elle regroupe une centaine de dessins et monotypes, et quelques œuvres tridimensionnelles. Dès la première salle, j’ai apprécié ressentir le caractère expérimental de son travail : pas d’impression de gradation entre des dessins que l’on pourrait définir de préparatoires, et les monotypes ou sculptures. Les croquis à l’encre sont peut-être le point de départ d’œuvres plus « abouties », mais je les trouve d’une intensité presque plus saisissante. Corps fragmenté, amas de chair, agglomérats de matières. Alina Szapocznikow expérimente de nouveaux matériaux tels que la mousse polyuréthane, résine polyester, limités à l’époque à un usage industriel. Elle démembre, défigure, déconstruit pour reconstruire. C’est souvent son propre corps qui est la base de ses expériences, presque toujours identifiable malgré les déformations. Dans ses premiers dessins d’étude, le corps apparaît encore comme entité, puis il se métamorphose en objets étranges, anthropomorphes. Ce passage de désarticulation de la forme est fascinant et bien mis en lumière par la scénographie de l’exposition.

Aussi bien dans ses œuvres en deux dimensions que dans ses sculptures, je ressens une certaine fragilité, de l’instabilité. Un peu comme si le centre de gravité de la figure était déplacé, toujours un peu trop haut ou un peu trop à gauche. Elle joue avec la pesanteur, et c’est peut-être ce déséquilibre (très maîtrisé) qui me tient en admiration devant chaque dessin. Les quelques prototypes d’objets « fonctionnels » qui nous sont présentés (coussin, lampe) sont d’autant plus étranges qu’ils se trouvent entre l’objet de consommation de masse et quelque chose de très unique, purement charnel.
Pierre Cabanne a écrit à propos d’une série de sculptures en cire « On ne sait jamais si les seins ou les cuisses qui émergent de cette espèce de lit sont objets d’étreintes ou saisis par la boue d’Hiroshima. On ne sait jamais si c’est l’amour ou la mort qui les révèlent ». Cette déclaration résume parfaitement l’ambiguïté du travail d’Alina Szapocznicow, entre angoisse et extase, déstabilisant et fascinant, viscéral et sensuel.





Gabrielle Petiau

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