lundi 8 novembre 2010

Il parait qu’on les coud sur les arbres / Le Lieu Unique

Murmeltier Bär
Il parait qu’on les coud sur les arbres
Le Lieu Unique,
Chantier d’artistes 2010.

   Cohue des épaules tièdes, on paye sans savoir. Escaliers, monte, monte. Entrer, devenir sourd. La pièce sombre, petite, trop d’angles, trop de coins ; s’y dissimulent des gnomes musiciens, encapuchonnés, hurleurs, créateurs de lumières et d’instants.
            Les yeux s’habituent. Identifient arbres, animaux, pattes de poulets, formes cabalistiques, pentacles inversés. Il y a la beauté angoissante d’un sous-bois nocturne, la grâce glacée d’un clair de lune. L’odeur fumée d’un zoo, la théâtralité d’une messe ; la force brute d’une apocalypse animale.
           
            Si c’est une forêt, elle est habitée par nous. 

            Les gnomes dessinent un ours perforé de balles de lumières, utilisent des instruments de musique avec l’instinct de la Nature. Ils frappent, frottent, frisent, frôlent. S’agitent, construisent et scellent la pièce. De lumière, de sons, de formes, ils cautérisent les failles, comblent les anfractuosités, occupent l’espace jusqu’à repousser l’homme égaré dans un coin.

            Pour vivre, pourtant, il faut bouger. Tourner autour de l’arbre gigantesque, être aux aguets, voir devant, voir derrière. Voir si la forêt meurt. Voir si la forme s’altère, ou se purifie.

            Les gnomes glissent et s’en vont.

            Nous sommes seuls.



Benoit Baudinat
 
 

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