mercredi 10 décembre 2014

RETROSPECTIVE SUR JEFF KOONS




26.11.2014 — 27.04.2015

Beaubourg






Je rentre dans l'expo à reculons. Jeff Koons très peu pour moi. Ses œuvres monstrueuses et hors de prix, le kitch d'accord, mais et après ?

Je regarde les premières œuvres avec un œil dubitatif et un léger sourire moqueur sur les lèvres. Je décide tout de même de faire un effort pour me pencher un peu plus précisément sur le travail de cet artiste si reconnu, puis peu à peu je rentre dans l'exposition. 

Son propos me parle : s'adresser à tout le monde en empruntant les codes des cultures populaires, refuser les formes discriminatoires comme le monochrome ou l'art conceptuel dont le public n'est qu'une élite, un pourcentage si faible de la population. L'art n'est-il pas fait pour les Hommes, tous les Hommes ? 
La vision de l'artiste est sensée offrir une nouvelle vision du monde au spectateur. Mais à quoi cela sert-il si les spectateurs concernés ne dépassent pas le nombre de dix ?

Koons refuse toutes formes d'exclusion et considère comme discriminatoires des œuvres qui seraient coupées du goût du plus grand nombre. Il essaie alors d'élaborer un vocabulaire plastique commun à tous. Il met au même niveau des œuvres classiques, comme le buste de Louis IV, et le lapin gonflable sorti tout droit de la culture populaire en les fabriquant dans le même matériau, l'acier, et en les exposant côte à côte. Il impose ainsi au monde le l'art des formes incongrues et indignes.

Il se met en scène dans des pubs, conscient du rôle joué par la communication dans le monde de l'art en 1980, phénomène qu'il ne cesse de questionner dans son travail.

Dans sa série Made in Heaven, où il se met en scène en plein acte sexuel avec Ilona Staller, actrice porno qui devient plus tard sa femme, il cherche à libérer la culpabilité associée depuis si longtemps à l'acte sexuel, culpabilité venant de la morale chrétienne. En effet l'univers de ces photos pornographiques est presque féerique.

Avec sa dernière série Gazing Ball il inverse le rapport entre culture populaire et culture classique. On observe alors des sculptures en plâtre, imitation de sculptures du XVIIIe siècle, inspirée de la Grèce antique sur lesquelles sont déposées des grosses boules bleues. Celles-ci sont encore une fois issues de la culture populaire. Elles servent de décoration dans les jardins des particuliers en Pennsylvanie. Ici les sculptures classiques servent de piédestal aux sculptures populaires.

Bref après un long moment immergée dans l'univers de Jeff Koons, je suis non seulement touchée par son propos, mais ses sculptures de mauvais goût commencent même à provoquer en moi un plaisir sensible (rien à faire pour Mickael Jackson et son singe en porcelaine).

Cette expo crée une ouverture sur le travail de Jeff Koons pour ceux qui seraient dans un rejet complet de son travail et permet de tracer un certain nombre de repères qui informent sur le cheminement de l’artiste.

Le débat reste là. Pourquoi créer pour la masse, tout en fonctionnant dans un monde capitaliste qui la déconsidère ? La polémique perdure mais son propos n'en est pas moins riche.

Il y a au moins une chose qu'on ne peut pas reprocher à Koons: il parle de manière assez juste du monde capitaliste régi par le désir de consommer et plus particulièrement de la société américaine. Il l’incarne même. Que ce soit dans son travail qui grouille d’objets de consommation, dans la vente de ses produits à prix fixes et exubérants ou encore dans la médiatisation de son personnage. Il le fait certes sans ironie et n’oublions pas qu’il était anciennement trader, mais après à chacun de faire son avis sur ce monde qu'il dépeint avec justesse.



Lou Chenivesse 












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